La projection du monde : James Baldwin

Avant de comprendre la puissance politique made in blanc du cinéma Baldwin a trouvé dans les films moins l’image mouvante du scepticisme que le merveilleux de ce qui fut pour lui et qui bientôt ne l'était plus et pour cause.

Jaillissait des films un monde fascinant dont l’auteur – tout comme nous – s'il  n’était que le spectateur restait trouvait là des puits de plaisir et de fantasmes.

En ce sens Baldwin souligne combien la projection du monde qu’opère le cinéma est nostalgique dans son jeu de proximité et de distance. Et celui qui fut le fer de lance de la cause noire explique comment le cinéma suggère ce qui arrive lorsque la réalité est projeté.

Elle met à signifier car le cinéma provoque la signification – évidence que néanmoins les philosophes de l’esthétique ont mis du temps à comprendre. Baldwin précise la magie mécanique d’un art qui rassure ou inquiète et sur lequel le spectateur ne peut intervenir.

Existe toujours - même pour un écrivain engagé - dans le cinéma un moyen de se déprendre du réel là où le monde scintille. L’auteur prouve que les films qui nous émeuvent crée une harmonie prédatrice voire pernicieuse puisqu’ils nous dépassent en nous prenant. Aller au cinéma rassure par leur illusion.
C’est ce que Baldwin comprit peu à peu et que Godard ne cesse de casser.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

James Baldwin, Le diable trouve à faire, Capricci, septembre 2018, 176 p. - 17 euros

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