L' inventaire bucolique de Caroline Lunoir : "La Faute de goût"

Un premier roman à saluer dans ce déferlement annuel de la rentrée. Une œuvre simple, courte et enjouée, un roman social qui possède une âme et une voix propre, un style poétique fluide qui coule en nous au fil des pages comme la risée sur l’eau de la piscine. Cette faute de goût qui est venue s’enraciner dans le potager, lubie du grand-père qui règne sur l’indivision du château et toute la tribu familiale qui se réunit chaque été dans le Sud de la France. Entre les cousins, les grand-tantes, les oncles et les enfants, Mathilde ne restera que le long week-end du 15 août. Elle donnera le change, éludera les questions gênantes, ne manquera pas de saluer le couple de gardiens, savourera la complicité qui l’unit à sa grand-mère, s’associera aux décisions du grand-père tout en n’en pensant pas moins, écoutera les jérémiades des mères, subira les assauts des enfants ; puis sautera sur l’occasion (un appel téléphonique) pour écourter son séjour et retrouver son mari qui rentrait plus tôt d’un séminaire. La haute bourgeoisie possède trop de codes, de conventions et de traditions pour que cela soit supportable bien longtemps...


Mais il y a aussi du bon à se souvenir, à comprendre d’où l’on vient, quelles racines nous portent malgré la possible critique et le grand écart entre les générations. Il y a surtout le domaine, la chaleur et le calme de la vie au grand air loin de la capitale. Une manière de savourer le temps qui s’arrête, d’admirer le panorama, la vallée à ses pieds, les toits du village en contrebas...
Un temps propice aux réminiscences : "L’hiver, quand je me lève au petit matin, les champs sont enrhumés de brume. Hier, j’ai enterré ma soirée dans un policier truculent, une poire et une tisane. Dès mon arrivée, mon grand-père m’en avait vanté les mérites. S’embusquer dans un fauteuil pour se plonger dans un polar est une sauvagerie tout à fait acceptée."


Quatorze chapitres d’une rare délicatesse s’articulent dans un florilège de compositions naturistes qu’une loupe amusée met en perspective par la grâce d’une plume agile. Caroline Lunoir possède une belle écriture. Qu’elle vous accompagne pour clore en beauté l’été 2011.


François Xavier


Caroline Lunoir, La Faute de goût, Actes Sud, coll. "un endroit où aller", août 2011, 115 p. 16,00 €

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