Aimé Césaire (1913- 2008). Chantre de la négritude, poète, pamphlétaire, homme politique . Biographie d'Aimé Césaire.

Maeterlinck et Césaire, la liberté pour être soi

« Parler du bonheur, n’est-ce pas un peu l’enseigner? Prononcer son nom chaque jour, n’est-ce pas l’appeler? Et l’un des beaux devoirs de ceux qui sont heureux, n’est-ce pas d’apprendre aux autres à l’être? ». Dans son ouvrage La sagesse et la destinée, paru en 1898, Maurice Maeterlinck s’emploie à rédiger une sorte d’art de vivre nourrie d’une vision spirituelle, n’excluant pas son côté mystérieux et ésotérique, qui semble d’autant plus facile à comprendre et à appliquer que idées et préceptes sont servis par un style aussi simple qu’élégant. Une telle clarté du verbe avait beaucoup séduit Octave Mirbeau.

Plus que les recettes habituelles de bien-être qui abondent dans ce domaine, ce sont davantage des invitations par petites touches à comprendre et évaluer la part de responsabilité qui revient à chacun dans la construction de sa vie. Dans ces pages, on passe pourtant de la joie au pessimisme voire au tragique quotidien. On s’interroge sur l’accès pour tous à un tel bonheur. Après cette invitation à construire dans la liberté son moi, le même auteur en éprouvait les limites et écrivait un an plus tard dans Serres chaudes, un recueil de poèmes : « Mon âme est malade aujourd’hui, mon âme est malade d’absences, mon âme a le mal des silences, et mes yeux l’éclairent d’ennui ». La vie de Maeterlinck est trop peu connue même si une de ses pièces, Pelléas et Mélisande, reste célèbre grâce à Debussy, plus tard Sibelius, et que Sarah Bernhardt interpréta magistralement. Il reçut le Prix Nobel de littérature en 1911, rencontra Mallarmé, et côtoya le symbolisme.

Le théâtre de Maeterlinck, oublié un temps, revit un nouvel intérêt, estime Monique Borie, agrégée de lettres classiques. La fatalité qui rejoint par bien des chemins la destinée y est, un des acteurs majeurs. Connaissant parfaitement les ressorts des exigences du théâtre, elle dénoue un à un les liens serrés, complexes, humains, sombres qui relient les personnages des pièces de Maeterlinck. « Le secret sur l’origine et la fin de l’univers, jamais totalement dévoilé, mais aussi sur la vie et la mort et leur signification, qui reste impénétrable, n’ont cessé d’habiter son théâtre » note-t-elle.  

Présentés et analysés par Gérard Cogez, docteur ès-lettres, ami de  ceux qui ont fait du voyage une raison de vivre comme Segalen, Lévi-Strauss ou Nicolas Bouvier, les textes d’Aimé Césaire semblent faire le même retour. Au vrai, ce sont des thèmes sont toujours essentiels. Le poète martiniquais, salué par André Breton et soutenu par Léopold Sédar Senghor qui lui fait rencontrer l’Afrique et la Négritude, est le grand combattant de ses racines antillaises qui comptent, dit-il « avec les deux composantes française et africaine ». Homme politique fondateur en 1958 du Parti Progressiste Martiniquais, Aimé Césaire (1913-2008) rejoint à plusieurs niveaux l’écrivain flamand. « J’habite une blessure sacrée, j’habite des ancêtres imaginaires, j’habite un vouloir obscur, j’habite un long silence, j’habite une soif irrémédiable... ». Croyant l’un et l’autre dans les valeurs individuelles, leurs voies issues de convictions différentes se coupent sur un même point de jonction et leurs mots ont un identique pouvoir de conviction, utilisés à des fins pas si opposées que cela. « J’ai toujours un espoir parce que je crois en l’homme. C'est peut-être stupide. La voie de l’homme est d’accomplir l’humanité, de prendre conscience de soi-même », écrit Aimé Césaire. Des mots que n’auraient pas désavouer Maeterlinck.

Dominique Vergnon

Monique Borie, Maurice Maeterlinck, collection le théâtre de…, 12x19 cm, éditions Ides et Calendes, mars 2018, 128 pages, 10 euros.

Gérard Cogez, Aimé Césaire, collection le théâtre de…, 12x19 cm, éditions Ides et Calendes, mars 2018, 128 pages, 10 euros.  

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