Yolande Bastoni : opérations à cœur ouvert

La vie,  le futur apparemment ça rentre dans des cartons. Presque tout est fait pour être empilé. Tout peut être bradé ou recycler - même les êtres ! Et ce surtout en un état de crise dont on ne voit pas la fin.  En conséquence et plus que jamais  l’art est nécessaire. S’il ne sauve pas il donne des moyens d’espérer. Yolande Bastoni le prouve. Elle traite l’humour par la discipline. Cela donne à ses œuvres une force incontestable et proposent une germination particulière. Chacune de ses sculptures est une  vraie fête de formes et de couleurs. Une histoire d’émotions aussi. Mais d’émotions très paradoxales. L’artiste, à l’ombre des figuiers, sait que le tank est né de la brouette et le drone mortel du cerf-volant. Mais ses sculptures sont là pour combattre avec ironie ces prolongements insidieux et les  indigences du temps.

 

Ses personnages (Popsis par exemple) sous leurs aspects de héros de manga ou de science-fiction sont des plus romantiques. C’est un paradoxe puisqu’ils ont parfois un trou à la place du cœur… L’artiste propose donc une série d’opérations à  cœur  ouvert. Elle prouve que le monde n’a plus de place pour la sensibilité. Pour preuve Popsis dans son impeccabilité d’ange blanc  est  non seulement l’opéré de la viande mais des sentiments.

 

Yolande Bastoni ne crée donc pas à travers ses personnages de simples fictions mais une allégorie tendrement cruelle et aussi glacée que chatoyante. Le tout sans le moindre pathos. Face au désordre de l’univers déshumanisé les « clones » humains ou animaliers de l’artiste permettent de faire jaillir  ce qui tremble encore et malgré tout dans l’être. Une joie, une erreur, un vertige, une promesse : qu’importe. Bref les fables de la plasticienne ont l’art de montrer à la légère ce qui nous pèse sur le cœur.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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