Jean Rault et les "portraits nus"

 

Jean Rault est passionné par le Japon. Après une résidence au Kyoto Art Center  puis à la Villa Kujoyama à Kyoto il ne cesse de voyager entre la France et le Japon. Devenu une figure marquante de l'art contemporain, le photographe s'intéresse à la représentation de l'espace et surtout du corps par la pratique de ce qu'il nomme des "portraits-nus" dans lesquels tout le corps devient visage. Ecoutons l'artiste : "Je revendique le fait que mes photographies sont des "portraits-nus" - j'insiste sur le trait d'union. Il y a de la nudité dans mon traitement du portrait, même lorsque le modèle pose habillé". Le dispositif choisi par l'artiste est lui-même « nu »  aux seins techniques sont  sophistiquées : " je tiens à ce qu’elles soient transparentes, qu'elles s'effacent et atteignent le dépouillement, la sobriété".



L'artiste fait bien la différence entre le nu que l'anglais décompose en naked et nude. Il se range du côté du premier terme car le second reporte dit-il "à l'académisme, au goût convenu et décadent d'une époque". Il demeure néanmoins un maître du nu traditionnel. Entendons par là du nu en tant que sujet bien distinct du nu fortuit. Le style est dégagé de la nature par l'élaboration d’une scénographie.  Les structures naturelles du corps ne coïncident pas avec les points de repères émotifs que l'artiste saisit sur les seins, le ventre, la chute de reins ou quelques que soient les attitudes de la femme en mouvement, au repos, à la renverse ou recroquevillée. Le photographe transforme le corps en visage afin qu'il exprime chez la femme la conscience de se voir elle-même dans le secret ou de se faire voir en s'abandonnant à une indiscrétion mise au point à la fois par le photographe et son "modèle". Rault parvient ainsi à figurer par le nu un « dehors » légendaire, imaginatif en dévoilant un espace clos et qui le demeure.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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