Misungui et l’épreuve des paroxysmes

« Performeuse et Modèle, féministe queer et pro-sexe, anarcho-communiste, militante pour l'autogestion et l'auto-détermination » comme elle s’auto-définit, Misungui pousse une expérience extrême de la connaissance de soi. En se confrontant à ses images, ses actions et ses textes il est impossible de taire l'émotion éprouvée par leur découverte. S’y engouffre une forme de vertige organique. Tout ce que l’artiste propose  est expérimental mais existentiel selon une figuration très particulière en une suite d’autoportraits dont la logique est implacable. Certains ne comprennent rien à un tel projet à la fois radical et épidermique car Misungui s’est libérée depuis longtemps de bien des interdictions. Dans sa vie et dans son art - comme Dracula - elle ressuscite toujours selon divers cycles sur le thème récurrent de la nudité qu’elle travaille parfois jusqu’à épuisement au sein d’une ascèse « tauromachique » où mise à mort et mise en vie, apparition et disparition font partie de chaque temps.  


En défis audacieux l’artiste s’hybride, se réinvente dans un besoin de changement perpétuel. Il ouvre les champs de la création. La sincérité de Misnugui est poignante. Son engagement esthétique et existentiel se module en un véritable engagement physique non  seulement théorique mais  politique dans  une rigueur imposée, un défi que l’artiste est une des rares à tenir – et ce dans l’esprit d’une Ana Mendieta par exemple. L’œuvre est l’expression, l’observation, la contemplation d’une résistance, d’une souffrance, d’une progression, d’une retenue, d’une violence, d’une douceur, d’un masculin, d’un féminin. C’est un acte visuel vivant et prodigieux, il vibre du corps céleste et charnel en révolution d’où jaillissent les pulsations du cosmos  et d’éblouissantes tensions de chair au sein d’auras là où mystère sensible de la beauté  reste irrésolu.


Jean-Paul Gavard-Perret

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