Fur Aphrodite : journal tellurique

Dans le formidable cortège de ses selfies Fur Aphrodite donne de ses nouvelles aux soldats inconnus aux petits lapins de terre qu’on nomme voyeurs. Grâce à elle ils semblent sinon choisis du moins, un peu moins oubliés de tous. Pour autant l’artiste ne se préoccupe pas des effets qu’elle suscite. Au mieux elle s’en amuse tout en ne cherchant pas une reconnaissance mais l’essence d’un actionnisme particulier.
Lorsque Fur-Aphrodite dégorge sa poitrine il serait judicieux de compter les journées de joie sur les doigts de ses mains. Faisant de nous des égarés provisoires, l’artiste rappelle qu’on n’est rien, à personne et pas même à soi-même. Ses photos d’identité (autre modèle selfique)  prouvent que celle-ci reste toujours à chercher
. Nulle question d’en faire le deuil : il convient à l’inverse d’en provoquer la renaissance mais loin d’un art clean. Celui de la plasticienne jusque dans sa « saleté » veut rendre la vie plus intéressante que l’art.


C'est sans doute pourquoi Fur Aphrodite espère  peu des hommes même si elle leur laisse des graffitis d’amour. Ou du moins ce qu’on prend comme tels mais qui rappellent combien l'infini n'est rien et que nul Dieu n'en sortira jamais.  Pour autant l’artiste n’est plus une Narcisse mélancolique. Elle devient mante peu religieuse qui dégage des gouffres engendrés par la maladie de l’idéalité. Seul le corps hante : nulle question d’en faire le deuil puisque l’artiste  en provoque la renaissance.
Il convient d'entrer dans ses selfies car l'âme y est soluble. Il convient aussi de préférer l’impureté de l'image à la caserne d’une prétendue pureté. Fur-Aphrodite écarte de toute erreur mystique. Il n’en demeure pas moins que vulve vue, Marie la vierge n'est pas pour autant adorable putain. Certes le cochon rêve d'y pointer son groin. Preuve que l'artiste renvoie au suint de l'être. Il ne que peut compter que sur sa fièvre porcine. Fur Aphrodite n'en fera rien. Ses dessins comme ses photographies par effet miroir renvoient à celui qui les regarde. L’artiste accouche le porc dans un surgissement volcanique.

 


Jean-Paul Gavard-Perret


Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.