Yvon Le Marlec : « Souvenirs dormant dans la chevelure » (Baudelaire)


Pour Yvon Le Marlec la chevelure demeure ce qu’elle fut pour Baudelaire : langoureuse et brûlante. Le corps montré-caché s’y fait plus profond quoique plus lointain. Le photographe l’épouse, se perd dans ses vagues brunes des cheveux, dans leurs roulis au moment où le modèle feint l’abandon, la paresse. Existe tout un jeu de lumière et de ténèbres. Le désir s’y mêle insidieusement à une sorte de mystique du corps par une structuration narrative du sublime. Le temps remplace l’éternité, la fixité l’animation. Mais  tout est réversible et dynamique.

Les scénographies gestuelles  exaltent de fabuleux reliefs tourmentés pour qu’ils dépassent en beauté l’entendement immédiat. Le monde dérive. Tout semble suspendu à la chevelure même lorsqu’elle tombe sur le corps. L’immanence  entraîne vers un état de rêve éveillé  que brouille ou dévore la chevelure en même temps qu’elle l’éclaire et le délie. Le voyeur sort du réel tout en restant dedans puisque la chevelure  devient le contraire d’un indice de la possession carnassière des apparences ou de la mimesis dans laquelle se fourvoie le prétendu "réalisme".
Souvenons-nous de Beckett : "Qu'ils ne viennent plus nous emmerder avec ces histoires d'objectivité et de choses vues". La chevelure - du moins telle que Le Marlec la photographie - les trouble.

Jean-Paul Gavard-Perret

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.