Miguel Nunez Rauschert, un voyage vers la lumière

Chaque tableau de cet artiste est une œuvre en soi, complète, aboutie, une fenêtre qui s’ouvre sur l’extérieur et se ferme lentement, une histoire inscrite sur la toile dit Jean-Paul Mas. Il faut les voir comme la traduction d’une vision personnelle du réel et la marque des étapes d’un long parcours devenant au fil des années le témoignage de l’existence du peintre.
Des tableaux qui sont aussi comme autant de phases rythmant ses recherches en termes de thèmes et d’effets de couleurs.
Ses compositions semblent fidèles au réel. 
À bien les observer, la part de poésie intérieure que Miguel Nunez Rauschert porte en lui intervient sans cesse. Elle inspire directement son regard mais lui laisse sa liberté de créateur. Ce que Lydia Harambourg appelle une réalité en miroir.

Les toiles renvoient à un lieu, un moment vécu, une impression devant le motif, une ambiance, une heure du jour ou de la nuit, un passage de saison. Ces étapes équivalent à des escales de différentes sortes et des rencontres dont il se souvient et qu’il a désiré fixer. Le tableau est pour lui un passé qui resurgit pour revivre autrement. Ce sont des images qu’il a gardées dans sa mémoire avant, peut-être des années plus tard, de les reproduire sur la toile afin de leur redonner une seconde nature.
Citons certaines étapes, New-York, Beyrouth, Lille, le Bosphore, Ivry, Rio de Janeiro. 
À sa suite, tableau après tableau, nous marchons le long des quais d’un port, nous voyons à travers la vitre les avions décoller de la piste d’un aéroport, nous dominons les édifices d’une métropole, nous flânons en lisière d’un rivage idyllique, nous découvrons une rue déserte pour un peu inquiétante, nous montons à bord d’un bateau blanc pour faire la traversée du Rio de la Plata, cette immense Mer Douce évoquée par Jules Supervielle.

L’attention portée à ces tableaux conduit à plusieurs réflexions. D’abord on remarque la supériorité de la verticalité, la ligne droite et rigoureuse qui s’impose, donne de la hauteur et de la profondeur afin de construire les perspectives. Les formes sont pour beaucoup géométriques, excluant ou presque le cercle et la douceur de l’arrondi.
Ensuite se notent de la mélancolie, de la solitude, l’absence de personnages sinon vus de dos ou passant rapidement, des silhouettes, des ombres qui apportent un contrepoint.
Si les tons froids dominent, le vert, le bleu, le mauve, les teintes chaudes se confrontent à elles, renforçant les contrastes et ajoutant leurs effets pour donner de la transparence et des jeux de nuances à chaque couleur. Parfois, le tableau est coupé en deux, horizontalement, proposant deux narrations qui se complètent ou s’opposent. Nous sommes invités à un voyage vers une lumière partout présente venue cependant de loin, de derrière la toile pour ainsi dire. Les tonalités qui paraissent assourdies deviennent des rayonnements, des vibrations intenses faites de mille particules de couleurs posées comme des pierres précieuses au couteau, rarement au pinceau.
Né en Uruguay, Miguel Nunez Rauschert a poursuivi sa formation en Argentine. Diplômé des Beaux-arts, professeur de dessin et de peinture, la France est sa patrie de cœur. De Miami à Londres, il a exposé dans de nombreuses villes. Cet ouvrage dont il faut souligner la qualité accompagne l’exposition actuelle (Le Pavé d’Orsay, à Paris).

Dominique Vergnon

Lydia Harambourg, Miguel Nunez Rauschert, peintures récentes, 70 illustrations, 290 x 235 mm, Escourbiac, mars 2024, 102 p.-, 35€

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