En 1911, Cat, une jeune femme à l’énergie communicative est engagée à la campagne dans la maison du pasteur Albert Canning et de son épouse Hester.

 Si l'existence est relativement douce dans leur foyer, l'atmosphère de cet été caniculaire est glacée par l'arrivée de Robin Durrant, un théosophe qui entraîne le pasteur à la recherche des fées.

En 2011, en Belgique, le corps d'un soldat de la Grande guerre est retrouvé, portant des lettres signées de Hester Canning. 

Leah, une journaliste qui se passionne pour l'affaire remonte l'histoire du militaire, ce qui l'amène jusqu'au presbytère des Canning, toujours dans la famille.

Entre deux mondes, deux époques, le roman de Katherine Webb dresse de beaux portraits.  Cat, fille d'une domestique et d'un notable ayant acquis une éducation qui ne lui sert pas. Née du côté de l'office, elle ne peut se résoudre à  une vie de bête de somme et se révolte. Son engagement auprès des suffragettes lui vaut un séjour en prison. Même au presbytère où elle n’est pas maltraitée, ce qui est la norme de l’époque pour une servante, elle reste une écorchée vive.

Hester, une jeune femme attachante, façon madame Bovary, amoureuse de son mari, qui n'a rien vu, rien connu,  se désespère de sa froideur  à son égard.

Albert, le pasteur, homme falot à la sexualité  indécise, tombe vite sous l’emprise du séduisant charlatan qui prétend rencontrer des elfes à l’aube dans la campagne.
Robin,  enfin, le rejeton d'une famille brillante qui ne se trouve pas à la hauteur de ses frères décide de se faire un nom dans l’occultisme en entraînant tout le monde dans le malheur et la chute.

Le climat  est pesant, le lecteur attend la catastrophe qui ne va pas manquer de se produire sans pourtant l’anticiper.  Les personnages empathiques des deux jeunes jeunes femmes, jouets des  deux hommes impuissants ou escrocs séduisent et émeuvent.

Comme dans l’Héritage, le précédent roman de Katherine Webb, secrets de famille, non-dits, crimes commis des dizaines d’années plus tôt empoisonnent la vie des héros et tuent à nouveau. Prenant et original.

Brigit Bontour

Katherine Webb, Pressentiments, Belfond, avril 2013, 406 pages, 22 euros.