Le texte pour s'envoler dans la fiction développe une sorte d'étymologie ou d'autopsie pour aller autant vers plus de romanesque que de vérité à partir de la Crête jusqu'à l'Espagne de Philippe III. S'y mêle l'histoire de l'Espagne et celle du peintre qui se sent Libre d’aimer à satiété. D’abord sa  peinture, sa femme et son fils. Enfin Dieu, envers lequel il se sent reconnaissant.
Tout sans ce roman bouillonne de massacres et de vie, de solarité mais aussi d'ombres. Car il y a d'un côté la mort et de l'autre la vie. Elles se matérialisent dans ce roman historique où se manifeste quelque chose de plus grand : à savoir la peinture.Et plus particulièrement de celui qui fut avide de gloire. Mais pas seulement. Le Greco devient peu à peu celui qu'il est : un génie visionnaire au milieu des désastres qui ont d'ailleurs pu faire naître cette œuvre aussi méditerranéenne que noire.
Le livre est luxuriant, malin, précis, impertinent dans sa démarche moderniste. En sort de ses crevasses le monde de Philippe III autant grand seigneur qu’archevêque pour qui au besoin est organisé en son honneur un autodafé est au programme. Le regard est autant happé par les malheureux qui périssent dans les flammes que par la robe de taffetas gris et la fraise immense de la nouvelle reine d'Espagne.
Celui que désormais est appelé El Greco, arrive dans ce roman picaresque jusqu'au faîte de sa gloire même si la joie qu’il manifeste se teinte de nostalgie. Ironiquement l'auteur peu se moquer de son jeu de la solidarité en un Charity-business avant la lettre précise l'auteur.
Et ce jusqu'à ce que le Crétois Domenikos redevienne l’étranger, le  métèque à qui l'on prêta pour mieux le détruire des origines juives. Et auxquels ses proches – pour se sauver des risques de celui qui commença à déranger – durent trouver divers stratagèmes car Pour l’heure, il fallait oublier El Greco.

Jean-Paul Gavard-Perret

Pierre Bréant, El Greco l'homme aux semelles de feu, coll. Bleu Turquin, Douro, 258 p., novembre 2023, 20€