Elizabeth Prouvost : juste retour du refoulé

Elizabeth Prouvost crée la dissipation du Visage divin sous la lune trouble d’images floues. Mais elles n’ont rien à voir avec les brouillages à la David Hamilton. Ces femmes saintes ou prostituées échappent à l’espace mental des mâles et de leurs propositions de fantasmes.

Les convulsions impériales  des femmes transcendent soudain  la mort, l’angoisse et le plaisir lui-même. On les veut soumises, elles sont les amantes de l’impossible, "après les ébats avec le chauffeur de taxi, elle diabolo menthe un accouplement ultime avec le cadavre de Dieu", écrit Véronique Bergen.
Les lumières vaporeuses de l’Orient ou celles des bordels parisiens sont remplacées par les torches des corps. Ils sont tendus moins vers les hommes que l’au-delà de l’humain. Mais qu’on ne s’y trompe pas : ce sont elles qui portent le Verbe entre leurs cuisses.

Dieu est donc désormais féminin. La femme devient  l’aleph de l’alphabet d’un  stupre ecclésial. Marie-Madeleine échappe à la sueur des mâles. Et celle qu’on disait chienne  est plus dieu que son dieu.
Par de telles saintes que tout passe ou ne passe plus. Il convient alors de relire les textes d’où elles sortent (Bataille, la Bible) pour comprendre le pas au-delà qu’Elizabeth Prouvost effectue sous des regards abasourdis et sonnés.

Les femmes ne sont plus des femmes mais le lieu du lieu, voire la partie sacrée du Christ qui – comme ceux qu’il est venu sauver - s’annihile en elle en oubliant la Crucifixion et la notion de pécheresse. Il ne la sauvera plus il sera sauvé par elle en un beau retour du refoulé.

Jean-Paul Gavard-Perret

Elizabeth Prouvost, Les saintes de l’Abîme, du 20 juillet au 2 septembre 2018, Jardins de la Maison Jules Roy, Vézelay.
Catalogue chez Humus, Lausanne.

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