Essai d’histoire et d’architecture à Tanger – Emmanuel Hocquard

Juste après de la Seconde Guerre mondiale, Tanger retrouve son statut international, perdu sous l’occupation par l’Espagne franquiste, et connaît dès lors une prospérité et un art de vivre sans précédent. Le cosmopolitisme très ciblé atteint son paroxysme, avant que par  son rattachement au Maroc, la ville se recroqueville sur elle-même.
Depuis le début du siècle, des capitaux deviennent et spéculateurs et promoteurs affluent et des constructions démesurées, vides et clinquantes viennent casser ce site d'exception. Si bien que peu à peu les traces du "vieux" Tanger s'effacent.  Angel Vazquez  le précise : Cette ville qui était entourée de cimetières depuis toujours, dit Juanita, est devenue elle-même un cimetière.
À partir de là, Emmanuel Hocquard interroge la notion de ruine concernera des objets architecturaux – dont des édifices creux qui, à l’origine, habitées ou non, mettaient en relation un dedans et un dehors. Ce qui fait ruine devient moins le délabrement, la dégradation d’un bâtiment que la disparition de ce qui, auparavant, servait à séparer ou à faire communiquer selon une infinité de modèles. La ruine atteste de l’annulation des différenciations entre intérieur et extérieur.

Emmanuel Hocquard épouse la ville dont il dresse un diptyque temporel en confrontant sa mémoire à un processus rigidifiant lorsque le temps fige les lieux dans un "ailleurs" peuplé de souvenirs. Tanger se dégrade : ce mouvement est devenu imperceptible et le seuil entre le vivant et la mort semble aboli. Le texte est splendide.
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Emmanuel Hocquard, Ruines à rebours, Éditions de l'Attente, mai 2022, 56 p.-, 11€

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