Quand les bossus chantent la gloire de Dieu : journal intime de Jérôme Bosch

Donnant voix à Jérôme Bosch, Frédéric Grolleau invente le journal intime (enrichi de documents) de l’artiste mort il y a 500 ans. Il montre comment  le peintre hollandais a exploré le monde en références à des formules alchimiques. La langue picturale évoque un certain nombre de principes d’élucidations furieuses et paniques qui n’ont jamais cherché à "essentialiser" l’art ou la condition humaine. L’alchimie y reste une manière absolue de restituer au monde sa profondeur en une unité où le beau est frère de la laideur et l’enfer celui du paradis.

Le langage accordé par l’auteur à l’artiste tout comme l’œuvre de ce dernier crée une phénoménologie particulière : la peinture n’est plus asservie ou limitée par son propre langage : celui-ci établit un arrachement, un affranchissement aventureux au déjà vu selon une modalisation qui renversa (et renverse encore) le rapport de l’art au monde comme aux idées et leurs découpes religieuses.

Grolleau instruit un dialogue intime entre son sujet et lui comme entre lui et son lecteur en vue d’accorder à ce dernier une clé majeure pour la compréhension de l’œuvre de Bosch. L’auteur montre comment se construit l’aspiration à l’unicité – mais pas n’importe laquelle - comme résolution finale. Ne demeurant jamais à la surface du monde l’œuvre picturale sous « la piété garnie de guirlande » laisse jaillir un monde occulté et grouillant de culs-de-jatte, de faux lépreux et de bossus qui viennent chanter « en crécelles » la grande gloire de Dieu et la comédie humaine qui la scénarise. Comme l’écrit Hieronymus/Grolleau :

« il faut de tout pour faire un monde.

Et le défaire ».

Jean-Paul Gavard-Perret.

 

Frédéric Grolleau, «  Hieronymus  - moi, Jérôme Bosch », coll. Bibliothèque de Babel,  Les Editions du Littéraire, Paris, 292 p., 23,50 E.



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