Portraits en ombre et lumière : Jean-Claude Bélégou

C'est en 1968, à quinze ans, dans une Maison des Jeunes, que Jean-Claude découvre la passion de la chambre noire :
J'y suis seul, j'oublie l'heure et tout le monde a oublié que j'étais là, il est plus de minuit, je sors par une issue de secours, il me faut faire plus de dix kilomètres pour rentrer, avec mon sac pesant de bidons de révélateur et de fixateur, à pieds chez mes parents, qui sont aux quatre cents coups évidemment. Je me désintéresse désormais royalement du lycée, s'y mêle mon tempérament frondeur et ma révolte adolescente.

Depuis l’auteur n’a cessé d’étonner par ses portraits intimes de nus, ses paysages champêtres et industriels en passant d’une esthétique sophistiquée à un naturalisme poétique très original. 
Il a cultivé – à côté de ses photographies en couleurs – un noir et blanc d'abord aux pauses érotiques cérémonielles pour se diriger ensuite vers un art du nu plus naturel. Le photographe ignore chasteté sans pour autant que la lubricité s’empare de l’image.

L’abandon qui s'offre ne possède en conséquence  rien d'obscène ou d'obséquieux. Le corps devient pratiquement une cosa mentale mais va bien au-delà par l'émotion qui s'en dégage dans le jeu que l'auteur entretient avec ses modèles. Entre études et "humanités" mais aussi entre les éléments naturels et les morphologies, la peau, la lumière, la diversité des anatomies se regardent et se méditent. L'éloge de l'ombre par le noir et blanc transforme le monde en douceurs tentatrices.
Et ce, en revenant aux situations du quotidien intime qui peuvent sembler des horizons aussi proches que lointains. Il ne s’agit pas d’exposer la dépouille du corps mais sa disponibilité de vie. Elle est toujours présente dans son mystère et son secret.
 

Jean-Paul Gavard-Perret


Jean-Claude Bélégou, Noir et blanc  une esthétique de la photographie, Bibliothèque de France, du 10 décembre au 1er février 2021

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