Les jolies histoires de Charles-Gustave

Si on n’a pas voyagé dans ces lointaines contrées, quelques repères aideront à composer le décor. L’imagination fera le reste. 
À une bonne centaine de kilomètres au sud-ouest de Stockholm, en bordure d’un lac, serti dans la verdure des plaines étonnamment plates du Södermanland, une province bordée à l’est par la Baltique, se tient  le château d’Åkerö. Une longue façade de couleur rose-orangé de dix fenêtres sur deux niveaux, des corps de bâtiment de part et d’autre, une impression d’équilibre parfait que rompent de grands arbres.
Bien que bâti initialement au Moyen-Age et réaménagé à la Renaissance, le manoir que l’on voit date des XVII et XVIIIe siècles.

Charles-Gustave, comte de Tessin, est une personnalité qu’il faut connaître. Orateur écouté, diplomate avisé et homme politique reconnu, il était de plus un fervent amateur d’œuvres d’art. Il possédait plus de 2000 dessins dont beaucoup venait de la collection du célèbre financier Pierre Crozat, mécène de Watteau.
Le peintre Louis Tocqué qui étudia auprès d’Hyacinthe Rigaud en a laissé un portrait classique mais élégant, évocateur de ses affections. Dire que Charles-Gustave était cultivé serait peu, il possédait le savoir encyclopédique de son temps et les connaissances humanistes de ses ancêtres. Il fut précepteur du jeune prince Charles de Suède qui deviendra roi sous le nom de Gustave III.
De plus, à l’exemple des autres cours européennes, rien de ce qui participait du rayonnement de la France ne lui était étranger. Charles-Gustave, comte de Tessin, mourut à Åkerö en 1770.

La neige recouvre la campagne. C’est lui qui accueille le lecteur dans sa demeure. Perruque blanche, redingote rouge et gilet jaune brodé en-dessous, escarpins à boucle, une canne pour l’aider à marcher. Pédagogue par passion, il écrit notamment pour ses petites-nièces de charmantes histoires où défilent en un joyeux cortège un lion couronné, un merlan portant une toque blanche, un aigle de haut vol et un moucheron rusé, une taupe laborieuse, un daim solitaire et un écureuil couleur carotte.
Vêtues à la mode du temps, des fleurs dans leurs cheveux blonds, véritables petites-filles modèles qu’aurait aimées la comtesse de Ségur, Ulrika, Eva, Augusta et leurs deux autres sœurs écoutent avec admiration, respect et entrain les fables inventées pour leur éducation par cet homme vénérable, sorte de La Fontaine nordique.
Comme ce dernier, il se sert des animaux pour instruire les hommes

Charlotte Bellamy a exploré les archives conservées à Åkerö. Elle a étudié les manuscrits de Charles-Gustave, rédigés en français, en a tiré ces textes pleins de verve et de sagesse. Inspirée par les beaux instants de l’enfance et ses moments d’émerveillement, créant des images qui sont autant de vivantes scènes de théâtre, Petit Berge (Hélène Berge) a animé ces pages avec sensibilité et délicatesse, leur donnant ainsi comme un nouvel écho poétique. 
À la fin du livre, quelques pages proposent un éclairage historique utile et intéressant. Pour les enfants, une lecture tout bénéfice dont les adultes aussi tireront profit.

Dominique Vergnon

Charlotte Bellamy, Contes suédois, les histoires de Charles-Gustave, 30 illustrations, éditions Michel de Maule, janvier 2022, 80 p.-, 25 €

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