Depuis son coup réussi, Livre + CD avec Manu Chao (Sibérie m’était contée – 2004 – Les milles paillettes), Wozniak s’était pourtant fait discret sur le front éditorial. On ne peut pas livrer sa production quotidienne au Monde, au Nouvel Obs ou au Canard Enchaîné et prétendre par ailleurs produire autant de livres qu’on le voudrait, ça se comprend…

 

Parfois, le dessinateur malicieux fait d’une pierre de coup, et réunit ses meilleures illustrations pour la presse dans des ouvrages anthologiques. L’excellente surprise de cet Entrée des artistes bouillonnant de couleurs, c’est qu’il n’a justement rien d’une compil de saison, contrainte et vite fichue. C’est à un véritable voyage au pays de ses artistes de chevet que Jacek Wozniak vous convie. Il y a quelque chose ici de la flamboyance visuelle du Yellow Submarine des Beatles, et ce n’est sans doute pas un hasard si les Fab Four se voient attribuer deux des plus belles doubles pages de cet album.

 

Si Wozniak est partout dans ce monde idéal, chaque artiste est pleinement là, lui aussi. Certains d’entre eux, facétieux, s’invitent chez les autres : Edgar Poe chez Becket, les Beatles chez le douanier Rousseau, etc. Et une furieuse envie nous prend, au sortir de cette luxuriante balade, de replonger dans un rif de Zapa, quelques lignes de Shakespeare ou une intégrale Kurosawa. Mention spéciale pour finir à la mise en page (« en scène » dit la couverture) de Marjorie Guigue, absolument exemplaire.

 

Frédéric Mars

 

Wozniak, Entrée des artistes, Ramsay, octobre 2006, 200 pages, 23 €