La mort moderne : quand la fiction rejoint la réalité

Carl-Henning Wijkmark écrivit ce brûlot en 1978, mais nous gratifia d’une postface en mai 2020, quelques mois avant son décès, dans laquelle il s’insurge contre l’Administration suédoise qui aurait laissé la priorité à l’économie au détriment de l’humain (pas de confinement en mars 2020 comme la grande majorité des pays), arguant que la Suède a le plus fort taux de mortalité de la planète proportionnellement à la taille de la population (il oublie de dire la tranche d’âge et n’évoque que certains cas en maisons de retraite où l’on laisserait mourir et cite un fils qui a réussi a sauver son père en imposant un traitement autre que la morphine à forte dose) ; à quoi je lui répondrai que c’est un faux calcul car la liberté ne se compte pas, ne se négocie pas, et que les morts qui résulteront de l’inactivité forcée – comme c’est le cas en France – entraînant dépressions et suicides, destruction totale de certains pans de la vie économique et sociale comme les restaurants et les lieux culturels et tout aussi dévastateur que la mort de personnes âgées. Et il ne faut jamais oublier que le taux de mortalité est de 0,5%...
On le voit, le débat est sans fin… d'autant que la vérité n'est pas là : le confinement est imposé car l'Hôpital est hors jeu. Vingt ans de sabordage en le gérant comme une entreprise du CAC 40 aura eu sa peau. Et la mentalité actuelle de tout arrêter dès que l'on se casse un ongle fait que l'on sacrifie le pays pour sauver quelques vies... Ce n'est pas ainsi que Versailles aurait vu le jour...

Cet étrange roman narré comme une pièce de théâtre, où chaque locuteur prend la parole au sein d’un colloque ultra secret, rappelle 1984 et mériterait la même notoriété tant il appuie là où cela fait mal. Le raisonnement poussé jusqu’à l’absurde démontre… qu’il ne l’est pas totalement, dès lors que l’on fait abstraction de l’émotionnel et du culturel. Si l’idée d’un âge légal imposé pour mourir est un peu difficile à avaler, l’autre versant du plan B (comme Zyklon B ?) est de recycler les corps humains – plutôt que de les brûler – pour approvisionner l’industrie chimique… En effet, l’être humain est un animal comme les autres, et puisqu’on l’incinère, qu’on lui prélève des organes pour d’autres humains, pourquoi ne pas pousser le raisonnement jusqu’au bout et recycler l’ensemble de la carcasse ? 

Pour cela il faudra retourner l’opinion publique, mais Carl-Henning Wijkmark sait fort bien comment cela fonctionne, et une fois encore, nous le voyons bien aujourd’hui. L’obligation librement consentie est un concept en vogue – le vaccin anti-Covid n’est pas obligatoire mais fortement conseillé, c’est la phase 1, viendra d’ici quelques années la phase 2 – puisqu’il est clair qu’une vague d’obéissance est en train de balayer le monde. Quelle joie de voir tous les soirs ces millions de petits moutons qui courent se faire vacciner un produit contenant de l’ARN pour la toute première fois, un produit dont nous ne savons rien, dont nous n’avons aucun recul, aucune expérience, mais le trentenaire éduqué au GAFA et à la culture Soros hoche la tête en signe de soumission. Pathétique humanité qui signe son propre anéantissement intellectuel… 

Les gens sont terrorisés par l’afflux d’informations et succombent au principe de précaution (mais quid de la vie spirituelle, intellectuelle sans liberté ?) sans réfléchir plus loin que le bout de leur nez. La sécurité, c’est être captif de la bureaucratie qui en vit de façon parasitaire. Phrase succulente par les temps qui courent mais étonnante quand on la remet dans son contexte : 1978. Qui a dit que les écrivains ne sont pas visionnaires ? D’ailleurs le ministère des armées vient enfin de s’en rendre compte et a créé un service dans lequel les romanciers de SF sont invités à proposer leur vison du futur. Il n’est jamais trop tard pour bien faire… 

Pour éviter de nous plomber le moral Wijkmark invite Kant dans l’un des discours des appariteurs : l’homme des lumières affirmait que les fictions indispensables pour préserver l’humain – une manière détournée de parler des religions – devaient être conscientes. On comprend, et pourquoi il fût excommunié, et pourquoi l’on évite soigneusement d’en parler à l’école… Idem pour sa vision du futur qui est aujourd’hui notre quotidien : Si la justice vient à succomber alors la vie humaine sur Terre n’a plus de sens. Une réalité que l’on côtoie tous les jours puisque l’État étant faible, les voyous de toutes sortes (des cols blancs aux caïds des cités) se sentent pousser des ailes. Oui, ce roman est bien une radiographie de nos sociétés perdues… 

On ressent au fil des pages toute la morgue de la bourgeoisie de gauche qui sévit en Suède depuis des décennies et qui n’a toujours pas compris que nous ne sommes pas tous égaux, et encore moins dans la mort, et c’est tant mieux ! La richesse d’une nation, d’une société, c’est la différence, entre une femme et un homme pour commencer ; il n’y a pas d’égalité dans la manière dont on nous la présente. Un homme n’est pas conçu pour porter un enfant – même si quelques débiles profonds le font – et une femme n’est pas conçue pour s’affranchir des hommes comme certaines militantes le réclament. La force de l’humanité c’est la complémentarité mais les idéologies sexistes ont fait que désormais une guerre des genres s’est invitée en France et que cela est allé jusqu’à modifier les lois, notamment dans le Code du travail ou le Code civil et l’on en arrive aux mêmes idioties qu’aux USA où l’on n’ose plus complimenter une femme sur sa tenue de peur d’être attaqué en justice pour harcèlement. Ce qui convient à un peuple anglo-saxon ne convient pas à un peuple latin, mais Soros et Cie n’en ont cure, tous pareils sur toute la planète, l’impérialisme américain entreprend désormais de s’attaquer aux consciences, au mode de vie, à la pensée des gens. Et le troupeau applaudit des deux mains puisqu’il ne faut surtout pas contredire les GAFA…  

Un intervenant parle de géronticide si l’on décide de limiter l’âge de la vie (75 ans) en oubliant que le Japon médiéval voyait les famille abandonner ses vieux dans la montagne, voire les précipiter dans le vide dès lors qu'ils ne pouvaient plus travailler et devenaient des bouches inutiles à nourrir, et tout le monde s'en accommodait. Cependant, il faut bien avouer que la vie dans les Ehpad est souvent horrible. Reconnaissons que le terme de qualité de la vie est vidé de toute substance, fait l’effet d’un affront, et il est indigne et mesquin de ne pas délivrer ces êtres de ce qu’on appelle la vie mais qui n’est plus  pour eux que tourments et humiliations. C’est pour cela que je mettrai plutôt fin à mes jours, d’où l’importance d’une libération totale de l’euthanasie pour que tout un chacun demeure libre de finir ses jours comme il l’entend et non en légume au service des dividendes des grands groupes qui contrôlent désormais ces mouroirs qui ne veulent pas dire leur nom !   

 

François Xavier 

 

Carl-Henning Wijkmark, La mort moderne, traduit du suédois par Philippe Bouquet, Rivages, novembre 2020, 173 p.-, 18 € 

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