"Les Revenants" de Laura Kasischke
Alors qu'elle n'avait jusqu'ici que flirté avec le fantastique, explorant les zones frontières entre le réalisme cru et les mystères inexpliqués, elle annonce ici la couleur dès le titre : il sera question de revenants, de fantômes, ni plus ni moins.
Les lecteurs assidus de L.K. savent à quel point elle est douée pour faire vivre des personnages féminins crédibles et insaisissables à la fois. Elle avait déjà inventé des héroïnes adolescentes ou étudiantes, notamment dans La couronne verte mais elle excellait surtout dans les femmes quadragénaires, coincées entre mariage, enfants et ambitions professionnelles, sans parler du spectre de la vieillesse ...
Elle s'éloigne un peu ici de la question féminine, même si certaines scènes font penser à Virgin Suicides, le film de Sofia Coppola adapté du roman de Jeffrey Eugenides (excellent romancier dont il faut lire aussi Middlesex).
Les Revenants est un "campus novel" qu'on imagine très bien adapté au cinéma (mais pas par le même réalisateur qui a massacré La vie devant ses yeux) : on y retrouve tous les ingrédients du genre, vus mille fois dans les séries américaines pour adolescents et les films d'horreur comme Scream.
On peut également penser à l'épatant roman de Marisha Pessl La physique des catastrophes (1) et à un autre roman un peu plus ancien, Le maître des illusions (2) de Donna Tartt. Comme dans ces deux romans, l'histoire se déroule dans un campus américain et il y est question d'étudiants morts et/ou disparus et d'une enquête en forme de rite initiatique.
Au-delà des clichés propre au
genre, la romancière parvient à garder son style bien à elle et son
talent pour rendre les ambiances étranges et les perceptions sensorielles de
ses personnages.
Un roman remarquable qui plaira autant aux lecteurs passionnés de Laura Kasischke qu'à ceux qui la découvriront avec ce livre peut-être plus accessible que ses précédents.
(1) Gallimard, août 2007, Folio, janvier 2009
(2) Pocket, mai 2012
Laura Kasischke, Les Revenants, Christian Bourgois, septembre 2011, 587 pages, 27,30 euros
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