Laura Taily : crucifixions

En ses sculptures, masques et peintures Laura Taily pose la question du corps. Dans ces figurations celui-ci enveloppe un certain vide, devient une armure en loque mais  reste néanmoins chargé de sensualité. D’où le double jeu et trouble qu’il induit. Que peut-il faire ? Que peut-il donner ? Telles sont les questions ouvertes par l’artiste. Quoique offert il ne se laisse pas saisir. Il parle dans la retraite de sa masse plus hallucinatoire que difforme. Enfermé en ses propres parenthèses il fait sécession aux figurations courantes. Détaché du fond du monde il n'a rien qu'à être le peu qu’il est (le peu que l’autre lui accorde ?).

 

Laura Taily l’ouvre néanmoins par fragments et morceaux. Il se déclôt ça et là, demeure très proche et très lointain, semblable et dissemblable. De tels « miroirs »  ouvrent par leur dimension « monstrueuse »  à qui nous sommes. La nudité -  image aussi fascinante que banalisée -  n'est plus qu’une zone de fragrance marginalisée. Elle fait le jeu d’une monstration qui n’a d’autre intentionnalité que mettre à jour l’image intégrale de notre vide et de ses  foyers inconscients. L’œuvre est une interrogation majeure sur ce qui hante et échappe à travers l’érection de créatures aussi offertes qu’entravées. Elles font penser à une crucifixion, parfois en des triptyques où il n’y aurait ni Christ ni larrons. Comme si de Grünenwald il ne restait que des ombres.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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