Lee Miller, une femme reporter sous les bombardements

Pour témoigner de la guerre, elle a une seule arme, son Rolleiflex. Afin de saisir l’essentiel du moment, tout assimiler rapidement ainsi que le note dans la préface de ce livre son fils, Anthony Penrose, écrivain et sculpteur. En effet l’appareil bi-objectif bien connu ne quittait jamais Lee Miller, que ce soit au cours de ses voyages aux États-Unis, en Europe, dans le désert égyptien ou pendant la Seconde Guerre, ou quand elle assista à la libération de Paris, ou encore entra dans les camps de concentration avec les troupes américaines.
Née à le 23 avril 1907 dans l’État de New-York, formée à l’école des Beaux-arts, mannequin, formée par Man Ray, amie de Picasso, Max Ernst et de Paul Éluard, Lee Miller est depuis l’enfance passionnée de photos. Elle travaille pour les plus célèbres magazines comme Vogue et Life. Elle ouvre un studio en 1932. Ses clichés sont réputés pour leur force visuelle, leur sensibilité, leur acuité, cette part de poésie qui n’élimine pas la vérité, un réalisme qui exclut tout sensationnel.
Intégrée dans l’armée américaine, Lee Miller arrive sur le front de Normandie en juillet 1944. portant treillis et casque, aussi à l’aise parmi les GI’s que proche des populations sinistrées et des réfugiés. Le 13 août 1944, elle est à Saint-Malo tenue par les Allemands. Elle consigne sur le papier ce qu’elle voit, entend, ressent. Ses notes qui accompagnent ses prises de vue sont autant de nouveaux instantanés, ajoutent aux clichés une nouvelle densité vécue. Ce livre relate son séjour dans la cité malouine assiégée, bombardée, enflammée, détruite. A l’exception d’une sentinelle, la place Chateaubriand était vide…des bottes, des débris de munitions, des fils de fer barbelé et des pièges là où se tenaient autrefois des tables de café devant l’hôtel calciné.

Lee Miller assiste en direct aux combats, suit les troupes, participe aux missions de renseignement, transmet des informations. Elle semble présente partout où l’action s’engage.
En noir et blanc, c’est parce qu’elles sont humaines mais sans complaisance que ses photos frappent le regard, que ses images sont pourrait-on dire frontales, directes, belles par ce côté authentique de l’approche et de la restitution.
Lee Miller est au sens premier du mot reporter celle qui rapporte les faits tels quels. Je fais des documents, pas de l’art disait-elle.
Parmi les boîtes en carton qui contenaient environ soixante mille négatifs, lettres et ordres militaires constituant les archives de Lee Miller, une sélection a été faite. Elle est présentée dans ce livre qui est le catalogue de l’exposition organisée à Saint-Malo (jusqu’au 29 septembre). Un bel hommage rendu à la ville 80 ans après sa Libération.

Dominique Vergnon

Lee Miller, Anthony Penrose, Lee Miller, Saint-Malo assiégée, août 1944, 220x270 mm, illustrations, Hazan, mai 2024, 128 p.-, 30€

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