Tamina Beausoleil : Osez Joséphine

« Crue-elle » mais douce aussi, enracinée au plaisir du mâle la femme devient  mère glaise au moment où l’artiste casse ironiquement les « re-pères » et les codes.  Surgissent cernes, vacarmes, mouvements, troubles de l’espace parce que l’espace ment. Plus on s’éloigne plus il nous fait de l’œil. Voyeur, voyeuse, pénétrée et pénétrant deviennent les couples d’un même « char » à bras et à jambes. L’artiste semble fixe à  la nuit sexuelle dont nul n’échappe.


La femme est officiante, orante mais qu’on ne s’y trompe pas : elle reste armée de toutes ses lumières et tout autant ouverte pour des jeux où ne cesse de planer l’humour pour embrasser l'impossible - qu'il ressemble à un coït ou au bleu du ciel.

 





Les dessins de Tamina Beausoleil cultive une radicalité plus ironique et tendre en dépit du fractal que les narrations suggèrent. La créatrice chamboule les processus libidinaux tout en les exacerbant. Elle nomme parfois les femmes grues, chiennes, louves, dindes, cochonnes : elles sont plus dangereuses et dominantes qu’il n’y paraît. Leur chair s’hybride de diverses adjuvants et parures. En détournant les codes d’éros et de la séduction l’artiste questionne le regard dans un jeu entre la bête et le mental. Le corps demeure central, les femmes sont filles de l’air et de la carnation. Pour les mâles il s’agit de grimper au rideau mais ils deviennent leur propre projectile violemment soulevé du sol. Au bout du compte chacun est lié à la première comme à la dernière des femmes et comme l’artiste le rappelle il dit « Je veux être toi ou rien ».  Il n’est que pantin. L’artiste s’en amuse. Ses filles du désert deviennent les égéries aux flirts poussés mais  dérisoires  afin de construire une critique de l'image en soulignant la pauvreté du mâle dans les corps-accords où le maître est l'esclave. La femme, par le pivot et la force centripète qu'elle crée,  fait le spectacle en se moquant d’une part des poses mythiques de la chorégraphie sexuelle dont l'histoire de l'art regorge et d’autre part des hommes et leur pauvre regard.

 

Jean-Paul Gavard-Perret


Tamina Beausoleil, Eponyme, Edition de la Salle de Bains, 2015.


Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.