Betty Tomkins et les autres : du féminisme iconographique radical

                   



Depuis les années 60-70  les artistes féministes peuvent afficher de manière radicale leur sexualité et leur désir quelle qu’en soit la nature. La célébration du corps passe désormais par diverses « figures » : l’élégance, le sérieux, la provocation, le trash ou le « girly ». Certes pour les féministes les plus radicales il existe entre la vision de la sexualité et du féminisme parfois une coupure. Néanmoins toutes se réunissent pour s’emparer de ce que le mâle, en un harcèlement optique, avait confisqué. La pornographie comme les imageries « illicites » fomentées par les femmes sont entrées dans le champ artistique avec une force sociale et politique.


L’exposition de Dallas montre les travaux d’artistes qui furent souvent vilipendées et censurées : Joan Semmel, Anita Steckel, Betty Tompkins. Toutes ont sorti la féminité d’une vision orthodoxe et main street. Tompkins fut sans doute la plus radicale et le paya. On refusa son œuvre sous divers prétextes (« trop jeune, trop inexpérimentée » disait-on). Voire… Mais les hommes à l’époque imposaient ce qui était « bon » pour les femmes et les visions à leur accorder. Le sexisme resta largement encouragé sur la scène officielle américaine jusqu’à la fin du siècle. Et ce fut parfois l’Europe qui fit bouger les lignes. Tompkins passa de l’off-scène  grâce à la Biennale de Lyon. Même si elle reste taxée dans sa vision du corps (dont ses « fuck paintings ») moins femme qu’homme par ceux qui n’acceptent pas son œuvre.


“Le sexe en érection pouvait entrer dans les femmes mais pas dans les musées” : tel fut le slogan du collectif féministe « The Fight Censorship Group ». Fondé par l’artiste Anita Steckel, le collectif  exhiba le pénis comme était montré le vagin. Après Tompkins l’artiste fut une de celles qui permirent au sexisme et la pudibonderie masculine de reculer. Il ne faudrait cependant pas oublier à côté de telles artistes  les pionnières Joan Semmel, Tutti, Louise Bourgeois et Hannah Wilke. Semmel cassa les connotations « mâlignes » en dénonçant par ces monstrations l’industrie du sexe féminin. La pornographie underground sortant du ghetto lutta ainsi contre une coercition et la prostitution visuelle que Tutti dénonça. Le ver était dans le fruit l’exposition de Dallas le prouve. Même si bien sûr un tel « show » ne sera pas exempt de regards « ambigus » ou douteux…


Jean-Paul Gavard-Perret



“Black Sheep Feminism : The Art of Sexual Politics”, Dallas Contemporary, Pars 2016


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