Benjamin Hoffmann :  ils de l'île

Dans son essai Les Paradoxes de la postérité (Minuit, 2019), Benjamain Hoffmann démontrait l’échec ultime de toute recherche d’immortalité symbolique par la littérature, il cherchait à répondre à la question : Pourquoi écrit-on ?
Ce roman en offre une réponse. Certes partielle mais réponse tout de même.

L'auteur nous fait entrer (mais pas seulement) dans île  à mille kilomètres des côtes de l’Inde. Elle abrite le dernier peuple entièrement coupé du monde moderne : les Sentinelles. Leur origine est inconnue. De même que leur langue et leur spiritualité. Ils repoussent depuis des siècles ceux qui abordent leur île. C'est comme si leur univers était libre et que les autres n'avaient rien à y faire.

Le livre mêle l’histoire de ce peuple de même que celle de Krish et Markus deux amis que oppose sauf la fascination pour l’île interdite.  Sur elle ils vont atteindre à un point de non retour  après bien des flash-backs qui expliquent leur dérive.

Le roman non seulement est celui d'une aventure personnelle mais il met à nu les rapports de classes, l’Amérique contemporaine, la destruction d’un couple, la mondialisation et ceux qui tentent de lui échapper dans une opération achevée et inachevée là où le principe même de réalité devient fragmenté et insaisissable.

S'adressant en confidence au lecteur le narrateur (un des héros) nous approche de ce "lagon turquoise et d'abysses bleu marine" dont Google Maps ignore tout et ce jusqu'à une fin tragique. Entre temps, bien des zigs-zags parsèment la fiction aussi sauvage que première. Hoffmann y fait preuve d'un talent de conteur exceptionnel. 

Jean-Paul Gavard-Perret

Benjamin Hoffmann, L'Ile de la Sentinelle, coll. Blanche, Gallimard, février 2022, 384 p.-, 22 €
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