Annie Zadek : avant et après
Ce livre est celui de l'errance et tout ce qui lui est consubstantiel : l'abandon et la déchéance. Bref la peur de vivre et de mourir. Le texte puissant d'Annie Zadek pousse en conséquence à s'interroger sur le sens du contemporain. D'autant que celui est toujours plein de morts : celui du passé des génocides comme celui du père que l'auteur n'a pas eu la force d'accompagner dans son trépas.
Si bien que le contemporain est aussi l’inactuel : il porte en lui forcément un décalage, un déphasage et un anachronisme. » De A à Z Annie Zadek le rappelle dans cette sorte de biographie implacable et ses dépassements "archéologiques".
L'auteure tente d'y faire voix même si elle a perdu sa langue première le Yiddish "assassiné". Elle le fréquente encore - habitée de siens d'hier et d'aujourd'hui, vivante et mortelle. Et ce dans une langue tierce car renouvelée par ceux l'ont quittée et qu'elle même n'a pas accompagnés.
Annie Zadek crée un parcours au delà du présent tant elle reste prise en étau entre ce qui fut et qui ne peut s'oublier. Elle préserve un dialogue entre les vivants et les morts mais dans la peur "que mes livres ne soient lus que par des gens qui me connaissent (…) par des femmes généralement / jamais par des gens de couleur ».
C'est la pari à tenir et que forcémet - faute de mieux - l'auteure relève. Il sera suivi par de nombreux lecteurs.
Jean-Paul Gavard-Perret
Annie Zadek, Contemporaine, éditions Créaphis, juin 2019, 55 p.- 10 €
0 commentaire