Gilles Berquet : du bon usage du fétiche

Afin que l'image s'enrichisse d'un onirisme nouveau, Gilles Berquet possède et propose la capacité d’y introduire du fétiche Cette puissance des images à faire rêver et à représenter autre chose, laisse poindre la volonté d’inscrire une nouvelle dialectique dans l’érotisme.

Le fétiche permet de faire décrocher d’une réalité trop plate afin d’offrir un remodelage  particulier. Celui-là plus que métaphore ou symbole, provoque un  déchirement et un creuset.

Par un tel bouillonnement il s'agit de faire rêver selon divers types de hiatus. Le sentier de la création prend  une autre signification que l'habituelle accordée à l’iconographie érotique et son imaginaire éculé. Se crée une ouverture néo-surréaliste. L'image par delà le psychisme humain rend aux formes l'expérience même de l'ouverture.  

Mais le fétiche devient aussi une manière de geler le surgissement fractale de la simple nudité. Il devient la figure syntaxique majeure d'une poétique dans laquelle le discours visuel procède par ruptures  – plutôt que par simples développements. Il crée une imagerie sans chemin. Elle se déplie puis se perd mais pour une découverte inédite d’un monde qui n'érige plus seulement une effervescence de sensations attendues. Se crée  un vide grouillant tant il ouvre à quelque chose d'insaisissable au delà de l'univers de la sensation primaire de fascination ou d’effroi.

Le fétiche suggère de manière incisive et insistante une impossibilité de certitude, de conclusion, de clôture. Cette figure devient une sorte de clé de l'œuvre. L’image crée  les mots / aux mots /sans mots (Beckett) et transforme l’artiste en déconstructionniste d’un genre particulier. Il retourne sur elle-même l’image loin de l’inanité plate, apathique et désabusée de sa mécanique litanique habituelle. L’artiste y cerne un inconnu auquel il donne forme.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Gilles Berquet (texte de Michel Onfray), Le fétiche est une grammaire, éditions Loco, 2018 ; 240p., 49 euros

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