Colm Tóibín : Thomas Mann hors de ses gonds

Tóibín dans son roman biographique (ou cette exofiction) de Thomas Mann cultive plus les fruits de son imagination que de la vérité historique. Même si Mann est rattrapé par ses vieux (en l'occurrence jeunes d'ailleurs) démons dont se retrouve des traces dans Mort à Venise et La Montagne Magique.
Tóibín imagine Mann imaginer. Et s'en délecte. C'est parfait ainsi. Si bien que sur la personne de Thomas Mann, toutes les pistes d’interprétation restent ouvertes.
La fantaisie savante de Tóibín débaroule plein pot. Et sous prétexte de démonstration narrative qui n'explique rien, l'auteur redresse la statue de commandeur. Il rappelle ses tragédies parfois ses dénis (face au nazisme). D'autant qu'il estimait que banni du Reich il n’aurait plus de lecteurs. Mais il sera très vite l’une des voix antinazies les plus actives à la BBC et dans des conférences en Amérique.
Tóibín nous fait vivre son héros parfois roi nu en proie à de nombreux dilemmes mais pas seulement. Le fait du choix  de Tobias  de plonger à dessein,  marigot entre le roman et la biographie les complique encore plus Mais les lecteurs apprendront beaucoup tant  l’imagination de l'Irlandais est à son plus haut afin  de faire revivre la vie de l’écrivain entre sexualité et philosophie et son  génie créateur. Lire un tel livre reste d'un plaisir indiscutable.

Jean-Paul Gavard-Perret

Colm Tóibín, Le Magicien, traduit de l'anglais (Irlande) par Anna Gibson  Grasset, 2022, , 608 p.-, 26€

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