Eugenia

Quand, en 1935, Eugenia rencontre pour la première fois Mihail Sebastian lors d’un cours, elle pense comme la plupart de ses camarades que les raisons de l’animosité contre les Juifs sont justifiées : "Il existait un problème juif en Roumanie qu’il faudrait un jour régler si nous voulions rester maîtres chez nous".

A sa décharge, Eugenia est très jeune, son frère fait partie des Légionnaires, un courant nationaliste d’extrême droite, sa famille comme toute à peu près toute la société est antisémite : "Les Juifs sont des êtres à part, dont la vie n’a pas le même prix". Pour les habitants de Jassy : "Ils occupent des places, que devraient occuper les Roumains.

Le ton est donné.
La jeune fille qui fait le choix de défendre l’auteur contre la fureur des amis de son frère change très vite d’avis en aimant le romancier qu’elle suit à Bucarest.

Dès lors, elle n’a plus qu’un seul désir : combattre l’antisémitisme.
Journaliste, elle raconte le pogrom de Jassy de juin 1941 dans lequel 13 000 Juifs ont péri. Elle s’interroge inlassablement sur le mal qu’elle combat avec courage, sur la vie dans un pays gangrené par les idées immondes.

Si Eugenia est un personnage de fiction, Lionel Duroy la fait évoluer dans un monde réel, rencontrer des auteurs comme Eliade, Ionesco ou Malaparte, sans oublier Mihail Sebastian qui exista lui aussi.
Dans ce nouveau roman ambitieux, à la fois initiatique, historique philosophique, l’auteur abandonne l’autofiction pour un livre d’une ampleur inouïe sur les racines du mal.

 

Brigit Bontour

 

Lionel Duroy, Eugenia, Julliard, mars 2018, 487 p., 21 euros

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