"L’émancipation des travailleurs - Une histoire de la Première Internationale" : boîte à idées ?

Une histoire qui pourrait à nouveau nourrir quelques programmes politiques en mal d’idées.


Si Jean-Luc Mélanchon se plaint de manquer de temps d’antenne dans les médias, ce n’est peut-être pas un hasard. Ayant aussi endossé le costume communiste certains le voient certainement comme le pire ennemi possible. Ils n’ont sans doute pas tort. L’émancipation des travailleurs a toujours terrorisé le patronat. Sans parler des bourgeois qui ne rêvent que de continuer à bénéficier de leurs avantages... Donc exit le plus possible le Front de gauche, histoire de pouvoir mentir en paix. Mais. Il demeure en terre de France, non plus un petit village de gaulois intrépides et insolents. Il demeure un éditeur insoumis. L’impossible Eric Hazan continue vaille que vaille à publier. A donner la parole à ceux que l’on aimerait voir muet. Voire pire encore. Ainsi l’on pourra désormais lire avec intérêt cette histoire de la Ière Internationale (1864-1872) pour mieux cerner les dérives industrielles de notre société. La lutte des classes n’en a pas fini ! 


Et justement, c’est parce que le seul internationalisme qui prévaut est celui des marchés et de la finance qu’il faut redonner un coup de projecteur sur l’essentiel. Les Hommes grâce à qui cela se peut. Car sans travailleurs exploités point de marché financier ! 


Il est d’ailleurs étonannt de voir que depuis les années 1960 (centenaire de sa naissance) rien ou presque n’a été publié sur ce sujet. Doit-on y lire un désintérêt qui viserait la mise au banc du marxisme ? Mais si on enterre la lutte des classes c’est que l’on admet l’esclavagisme moderne. Raison de plus pour ouvrir ce livre-là.


Revenons donc aux sources. Découvrons ce qu’a été l’expérience de l’Association internationale des travailleurs depuis sa création, à Londres, en 1864. Jusqu’à son délitement, à la fin des années 1870... Que doit-on retenir ? Quel a été le vivier d’idéologies socialistes hétérogènes (proudhonisme, social-démocratie, marxisme, anarchisme) et finalement concurrentes, se disputant la direction du mouvement ouvrier ? Comment se comporter dans l’arène sous l’influence d’une lutte personnelle entre Marx et Bakounine ?


N’oublions jamais que cette première initiative solidaire eut pour but de fédérer de manière fraternelle des militants ouvriers décidés à inventer leur avenir eux-mêmes ! Et cela en dépit des concurrences nationales, des guerres impérialistes et d’un capitalisme déjà mondialisé, donc dérégulé... 


La première difficulté fut de parvenir à mener une révolution à la fois économique, sociale et politique, en portant ces trois desseins à égalité... Mais les débats vont très vite s’orienter vers deux voies divergentes. L’une prônait un syndicalisme généralisé pour la société. L’autre préconisait une solution exclusivement politique.


Cela commençait mal... Cette chronique pleine de rebondissements qui se lit comme un polar parvient à restituer une histoire foisonnante. Sans prétendre à l’exhaustivité, elle donne quelques clés et précisions sur les espoirs révolutionnaires de toute une partie de la population. Elle peint aussi les divisions et les illusions qui allaient mettre à mal ce formidable espoir de justice sociale. Une histoire qui pourrait à nouveau nourrir quelques programmes politiques en mal d’idées, en ces temps difficiles d’engagements et d’échéances électorales.


Annabelle Hautecontre


Mathieu Léonard, L’émancipation des travailleurs - Une histoire de la Première Internationale, avec un cahier central de 16 illustrations N&B, La Fabrique éditions, octobre 2011, 410 pages, 16,00 €    

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