Gilles Aillaud : que d’images !

Voilà un peintre qui écrivait. Somme toute action logique quand on appartient à la peinture figurative. Il est vrai que le côtoiement des formes et des couleurs l’encouragea à écrire. Une révélation qui lui démontra qu’écrire et peindre sont deux formes d’un semblable besoin d’expression. Mais ne vous attendez pas à quelques illustrations, les héritiers ont dit non sans plus de précision (sic). Pourtant Nicolas Pesquès livre ici bel hommage qui accompagne l’exposition au Centre Georges Pompidou (jusqu’au 26 février 2024)… Plutôt qu’un essai pur et dur nous voyageons dans la légèreté. Il entremêle au fil des pages notations poétiques, fragments de théorie sur l’art, descriptions de tableaux (faut bien quand on n’a plus d’image), bribes de souvenirs en compagnie de l’artiste…
Ce livre est ouvert. J’entends qu’il n’impose aucune affirmation définitive. Au contraire, il accompagne l’énigmatique question de ces possibles formules. Le fil rouge teint dans une intimité étroite et de longue date avec l’œuvre de l’artiste lié au courant de la Figuration narrative.

Ce livre vous embarque à travers l’ensemble de l’œuvre de Gilles Aillaud en cinq chapitres, reprenant d’anciennes parutions et trois inédits. Nicolas Pesquès suit le peintre dans le flux d’images qui compose une sorte de labyrinthe où il se tapit, Minotaure concentré sur les mouvements de sa pensée et les gestes de sa main qui, encore et encore, refont les mêmes trajets sur la toile : Le labyrinthe c’est l’autre nom du dehors, c’est tout ce qui est là : le paysage, la bête qui vaque, la main qui dessine, l’homme qui bifurque et continue.
Et de ce kaléidoscope jaillit un fourmillement d’images, peintes mais aussi verbales. Toutes deux déconstruisant les logiques discursives si réductrices. Aillaud peintre woke ? Allez savoir, il n’est plus là pour commenter cette nouvelle étiquette. Par contre, au regardeur de déjouer les pièges. D’admettre que mettre l’écriture en phase avec le muet pouvoir d’écarquillement et de bonheur que cette peinture prodigue, est bien la preuve qu’il se passe quelque chose de fondamentale…

Annabelle Hautecontre

Nicolas Pesquès, Chères images – Peinture et écriture chez Gilles Aillaud, L’Atelier contemporain, septembre 2023, 144 p.-, 20€

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