Albert Mathiez confirme avec "La réaction thermidorienne" que depuis plus de 200 ans nous sommes gouvernés par des Thermidoriens
En 1929, Albert Mathiez publiait La Réaction thermidorienne
aux éditions Armand Colin. Un livre devenu un classique. Mais épuisé et dont on
salue la réédition. Laquelle nous le présentera comme d’actualité. Tant les
coquins qui nous gouvernent se ressemblent. Ou plutôt se succèdent...
Mathiez dépeint une période dont on ne parle jamais. Et pour cause. Elle n’a
que trop imprimé sa marque dans notre histoire. Car, il faut le dire haut et
fort : nous sommes - depuis plus de deux siècles - gouvernés par des
Thermidoriens !
Quand l’incandescence révolutionnaire s’est éteinte avec l’arrestation de
Robespierre, la réaction triompha. Un grand retour en arrière. Une perte
définitive de la politique pour laisser la place aux politiques. Une manière
bien à eux de s’approprier le pouvoir et ses richesses.
La grande trajectoire de l’insurrection parisienne se termina par les émeutes
de la faim. Réduites au silence par les armes. Pendant 30 ans le peuple n’osa
plus bouger...
Il faut saluer la perspicacité d’Albert Mathiez. Il sut trouver les forces nécessaires pour résister aux dogmatismes de son temps. Grâce à sa méthode critique des sources - comme des interprétations - il sut refuser d’abonder dans le sens d’une histoire manipulée. Le savoir et la compréhension des choses humaines sont souvent menacées d’instrumentalisation. Cela au nom de l’action. Une chimère que croyaient les positivistes. Comme aujourd’hui ceux qui se couchent face à la puissance dominante. Or Mathiez, lui, ne se fonde que sur du concret. Il n’écrit pas pour catéchiser. Il œuvre pour mettre en lumière l’authentique.
Selon Mathiez, l’expression réaction thermidorienne ne désigne pas un
moment qui "renoue le lien avec la révolution de 1789"
considérée comme une révolution bourgeoise. Non. Pour Mathiez, cette réaction
est entendue comme une régression en termes de principes et d’action politique.
L'analyse que Mathiez propose de la Terreur et de la réaction qu’elle déclenche en retour est centrée sur la notion de démocratie. Dès les premières pages, Mathiez indique que son objet sera de montrer comment la réaction thermidorienne rompt totalement avec un mode de gouvernement démocratique. Mathiez n’hésite pas à employer le terme de dictature.
"Face à la construction du mythe du libéralisme économique et de la nécessité, présentée comme quasi naturelle, du capitalisme, Albert Mathiez a découvert que le républicanisme montagnard pouvait être un des points à partir duquel il est possible de penser une autre modernité, fondée sur les principes humanistes du droit à l’existence."
Annabelle Hautecontre
Albert Mathiez, La Réaction thermidorienne, présentation de
Yannick Bosc & Florence Gauthier, La fabrique éditions, septembre 2010, 410
p. - 25,00 €
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