Couleurs de l'incendie : de Charybde en Scylla.

En cette année 1927, le Tout Paris se presse aux obsèques de Marcel Péricourt à l’organisation grandiose quand tout à coup, un enfant tombe d’une fenêtre et atterrit sur le cercueil. C’est Paul, l’unique petit-fils. A-t-il basculé par maladresse, a-t-il été poussé ? La scène est violente, l’enfant handicapé à vie.
Sa mère Madeleine héritière de la fortune après le suicide de son frère Edouard à la fin de Haut revoir là-haut est dévastée. Elle perd pied.
Mal entourée d’un oncle profiteur, d’un amant précepteur de son fils, bourré d’ambitions, d’une confidente qui la trahit et d’un chargé de pouvoir qui la ruine, (sans oublier l’ex mari en prison !), Madeleine tombe de Charybde en Scylla.

Pourtant, c’est une femme forte qui en recrutant des personnes qu’elle n’aurait pas regardées du temps de sa splendeur va remonter la pente et parvenir à se venger de ceux qui cherchent à la détruire.
Entrent en jeu, un malfrat qui malgré une stupidité confondante réussit ses sabotages, une nounou polonaise haute en couleur, une diva qui va redonner le goût de vivre à l’enfant, un détective, un pharmacien. Tous plus saisissants les uns que les autres.

Madeleine qui n’a plus rien à perdre – elle est passée de l’hôtel particulier, qu’a racheté le fondé de pouvoir- à un petit appartement miteux- va déployer des trésors d’intelligence et de courage pour se sortir de sa situation ; donner un avenir à Paul et enfin s’estimer.

Avec un brio qui force l’admiration, une imagination sans limite, Pierre Lemaître ose l’inédit dans l’histoire littéraire française : donner une suite réussie à Au revoir là-haut, magistral Prix Goncourt 2013 ; objet d’une lumineuse adaptation au cinéma récompensée d’un César en 2018.
Dans Couleurs de l’incendie, les trahisons, les passions, les turbulences politiques : tout est réuni pour que la fresque initiée dans les débuts de la Grande guerre avec le précédent opus, gagne encore en ampleur.

Sur fond de crise financière, de toute puissance des banques, du nazisme qui arrive, de la misère de ceux qui n’ont plus rien, l’auteur se fait historien, mais sur le rythme soutenu, presque policier qui lui est familier. Jamais l’entre-deux guerre n’aura été raconté de façon aussi passionnante, rarement lecteur n’aura attendu la suite (prévue) avec autant d’impatience.

Brigit Bontour

Pierre Lemaître, Couleurs de l’incendie, Albin Michel, janvier 2018, 540 p., 22,90 €.

 

 

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