Emmanuelle de Boysson, Que tout soit à la joie : Par-delà les apparences…

Au cœur des années 1970, tandis que la lutte féministe est en plein essor, Juliette grandit dans un milieu bourgeois très conventionnel.

Désormais majeure et suivant des cours de théâtre à Paris, dans sa tête, les questionnements se bousculent. Comment tracer sa voie quand tiraillée entre désir d’émancipation et l’éducation transmise, on est encore une toute jeune femme en quête de soi ? Comment rester fidèle à ses rêves de liberté et de bonheur ?

Bientôt mariée puis mère, mais décillée sur l’idéal conjugal, un scandale familial vient étrangement faire échos aux tensions intérieures et interrogations qui la taraudent. 

L’oncle de Juliette, le Cardinal Paul Dantec, célèbre théologien que chacun admire pour sa sagesse et la noblesse des valeurs spirituelles qui l’animaient, est retrouvé mort au domicile d’une prostituée… 

La famille vacille confrontée à une histoire qu’elle ne parvient pas à comprendre, encore moins à accepter. 

Mais alors que la honte anéantit ses proches, Juliette, devenue écrivain, décide, contre l’avis des siens, d’en remonter le fil et de partir sur les traces de cet oncle si charismatique pour tenter d’appréhender en profondeur le drame qui s’est joué. 

À travers son enquête, se dévoile une autre facette de ce dernier. Derrière l’homme de foi, l’homme de chair n’a pas su résister aux charmes suaves d’une femme, une prostituée, dont il est sincèrement tombé amoureux, là où l’amour divin aurait dû primer et rester exclusif. 

Ce très beau roman, loin de sombrer dans ce qui aurait pu être le récit sulfureux d’un scandale, ouvre au contraire une réflexion d’ordre philosophique sur les failles, les blessures et les contradictions propres à la condition humaine, tout comme à la difficulté de les juger.

S’interdisant de condamner l’ombre ténébreuse du Cardinal Paul Dantec, Emmanuelle de Boysson renvoie le lecteur à la singulière lumière de l’amour humain et, malgré la faute et la transgression, au mystère de son incandescence.

Cécilia Dutter

Emmanuelle de Boysson, Que tout soit à la joie,Héloïse D’Ormesson, juin 2019, 220 pages, 18 euros

> Lire l'interview d'Emmanuelle de Boysson par Brigit Bontour

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.