Loren Groff : contes cruels

Ce recueil de fictions courtes moites, glacées et vénéneuses est couvert de nuages noirs mais aussi colorés. Les nouvelles forment 11 variations sur la fin du monde. Les êtres pétrifiés par les alligators des marigots ou les dettes choisissent de (se) perdre. Les chats s'en sortent mieux que les hommes mêmes si les uns comme les autres disparaissent et que certains sortent de leur corps en regardant le rire de la lune.
La vision de l'Amérique est cruelle. Elle est dépeinte de manière crue en un manuel de survie là où la Floride n'est pas celle que tend les clichés touristiques sur cet état des USA. Les serpents rampent au milieu de femmes qui tentent malgré tout de maîtriser leur destin - du moins tant que faire se peut.

De manière linéaire mais aussi luxuriante et parfois avec aller et retours le monde apparaît toujours inquiétant. Les nouvelles sont toutes différentes mais le livre demeure très cohérent dans sa vision qui annonce la catastrophe écologique et autres dégradations. Le livre laisse une impression à la fois opaque et prégnante. Et l'auteur a raison d'y rappeler que la terre est ronde car elle ne tourne pas forcément bien là où des fantômes planent.

L'unité n'est pas de lieu, mais qu'importe. Les sujets apparemment actuels et calibrés trouvent une nouvelle version. Puisqu'il s'agit après tout et néanmoins de sauver le monde au milieu d'une météo des sentiments en un décor saumâtre. Il  n'a rien de celui des cartes postales. Le cyclone (comme dans la photo de couverture) remplace le bleu du ciel.

Jean-Paul Gavard-Perret

Loren Groff, Floride, trad. de l'anglais par Carine Chichereau, éditions de l'Olivier, mai 2019, 300 p.-, 22,50 euros

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