Woody Allen en roue libre

Woody Allen se dit finir son existence de manière amère et un rien atrabilaire. Pour autant son livre garde une énergie et un humour dont le créateur a toujours fait preuve. La psychanalyse l'a sans doute aidé même si le succès du processus ne fut que partiel.
Le réalisateur – contre vents et marées – poursuit sa route. Elle aurait pu être mieux mais  peut être pire. Allen ne fut ni tennisman, ni grand chef mais le cinéma où il est arrivé par hasard lui a permis de passer sa vie d'une excellente façon au côté de femmes très belles et des personnes pleines de talent.

Les échecs font partie de la vie et Allen rappelle ses plaisirs même s'il est très dur avec ses films (Manhattan compris). Tout pour lui dans son œuvre est perfectible. Et le regard sur sa propre œuvre est sinon impitoyable du moins sans concession. Allen a toujours la sensation qu'il aurait pu faire mieux.
Mais qu'importe après tout. L'humour est là et l'auteur s'explique avec un  œil bienveillant pour certains de ses films dont La rose pourpre du Caire qui lui a permis de réaliser certains de ses "fantasmes" d'autant que le réalisateur rappelle qu'il a toujours préféré la vie fictive des films à la vie réelle.

Se retrouve dans cette autobiographie d'un misanthrope illettré et fou de gangsters le charme, l'ironie, la mélancolie et la dérision de l'auteur de Match Point.

Son autobiographie revient sur les controverses qui ont émaillé sa vie. Il les comprend et elles ne l'ont jamais inquiété. Bref, Allen reste philosophe même dans l'épisode de son histoire d'amour avec la fille de son épouse Mia Farrow. Il rappelle que tout était plus simple qu'on a voulu le dire et ne comprend pas que  l'on puisse se choquer de son union avec Soon-Yi à laquelle le livre est dédié. 
Jamais il ne se prend pour un génie et il commence son texte par une phrase d'exergue importante : Elle me mangeait dans la main jusqu'au jour où je me suis aperçu qu'il me manquait un bras. Cette plaisanterie plus sérieuse qu'il n'y paraît est là  pour évoquer la complexité des êtres. Et il nie en bloc certaines accusations d'attouchements qui pour lui défient toute logique. 

Un tel  livre illustre sans doute une vérité plus qu'un réquisitoire prodomo. Il est curieux à ce titre que cet ouvrage ait été interdit de publication aux USA. Allen y reste toujours vivant et prêt à tourner un nouveau film (à Paris).

Jean-Paul Gavard-Perret

Woody Allen, Soit dit en passant, Stock, juin 2020, 540 p.-, 24.50 €

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.