L'épopée nouvelle d'Alain Santacreu

D’emblée et par son titre une telle fiction ramène inconsciemment à une longue tradition littéraire .Mais quoique d’origine plus récente elle fut victime de son succès puisqu’elle  disparut sine die en 2017, la maison d’édition ayant déposé son bilan.
Quelques années plus tard Santacru, par une lectrice, apprend que son roman survit sous le manteau selon la tradition sourde à du samizdat. Séduite une telle lectrice (et auteure) propose un entretien de l’auteur et plus un renaissance de ce texte dont le titre premier Opera Palas est remplacé  par  Le roman retrouvé.
Sous le principe (discutable) de certitude – dixit George Orwell - que, l’Histoire s’arrêta en 1936  au début de la Guerre civile d’Espagne elle devient le début du roman de la fin : l’Histoire s’arrête quand la police fait l’Histoire.
On comprend l’ambition d’une telle fiction puisqu’elle reforge l’histoire du dévoiement de l’idéal émancipateur dans la modernité en l’achevant de la description  d’une partie d’échecs qui accorde une accréditation à une telle fiction qui après tout ne mangerait ps de pain. Mais tout est bon dans l’imagination. caractère profondément démonstratif où l’auteur à sa manière post spinoziste ollé ollé mais sérieux crée des fondements singuliers d’une éthique postmoderne politique – oxymore étant de mise.
Ainsi, songeant à un autre juif ibérique remarquable, Baruch de Spinoza, se découvre la sensation de lire un véritable traité de mathématiques modernes, lesquelles bouleversent les fondements mêmes de ce qui doit s'entendre non seulement l'Éthique de Spinoza mais de l'éthique politique. De parents anarchistes espagnols, Alain Santacreu professeur de Lettres, fondateur et directeur de Contrelittérature (manifeste pour l’esprit)  reste forcément un héritier notable de l’anarchisme espagnol mais l'esprit de l'auteur découle aussi du situationnisme.
Ce roman préside à la fête de la révolution et de la pensée. Mais que cette dernière le devienne émette bien des doutes. Même si l’auteur prévoit par lucidité des barrages nécessaires. Mais ce qui compte reste de se laisser prendre par une langue allègre et plein d’esprit d’une veine classique d’une tradition épique.
Certes l’auteur  pratique  la révision permanente, remettant en question ses propres opinions et croyances. Il invente  une méthode simple quoique et directe mais transmis divers sages de religions et traditions. La clé réside dans la question ultime,  moins Qui suis-je? ,  Qui sommes nous  même si pour l’auteur s’identifier à un groupe et une idée qui reste un problème. A cabale, cabale et demi cela vaut après tout une leçon plus libérale que sévère. Et c’est tant mieux.

Jean-paul Gavard-Perret

Alain Santacreu, Le roman retrouvé, Tinbad, avril 2024, 370 p.-, 29€

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