AMEXICA, La Guerre contre le crime organisé sur la frontière Etats-Unis/Mexique

« Je crois que dès qu’on la  franchit, on dit au revoir à tous ses droits en tant qu’être humain »


A force de vouloir mettre en place un ordre puritain de son côté du monde, et de déverser sa débauche chaque samedi soir de l’autre côté, les Etats-Unis ont créé un enfer à leur porte. La frontière avec le Mexique n’est qu’une longue cicatrice infecte, et des villes comme Ciudad Juarez, cette ville qui tue ses femmes, cette « décharge humaine », ne sont plus qu'une simple étape dans un parcours toujours plus sanglant... L’effroyable s’étire sur plus de 3000 km qu’Ed Vulliamy, grand reporter au Guardian, donne avec Amexica, La guerre contre le crime organisé sur la frontière Etats-Unis/Mexique qui commence à Tijuana et s’achève à Matamaros. C’est une guerre, avec ses milliers de morts, ses exactions, et sa règle, l’absence totale de limite. 


Le nerf de cette guerre ? La drogue. Et les cartels qui s'affrontent pour le contrôle des voies de communication, et deviennent si tant puissants que les états semblent incapables d'endiguer leur expansion, de condamner leurs crimes. Et d'autant plus que de très grandes institutions, comme les banques Wachovia et HSCB, mises en cause pour avoir été les lessiveuses d'un des plus grand système criminel. « Plus de 90 % des drogues qui entrent aux Etats-Unis proviennent des cartels mexicains. » Et l'argent qui revient, par camions entiers, plusieurs milliards en billets de banque, cet argent de la drogue, de la prostitution, des meurtres, des viols, alimente les rouages des banques et des bourses, qui, pour un spécialiste interrogé par Ed Vulliamy, notamment New York et Londres, ne sont que des places fortes du blanchiment mondial des trafics.


La guerre des cartels, leurs organisations, les ramifications incroyables, tout cela est présenté. Mais l'important est ailleurs, l'important est ce que le grand reporter n'a pu voir mais que tout le monde connaît, constate, et qui alimente ces trafics, ces meurtres : la consommation de la drogue dans les pays riches. 


On sort de cette lecture bousculé, haletant. L'enfer est un long fleuve tranquille, mexicain, charriant sang et souffre, et Ed Vulliamy a suivi son cours et respiré « l'air vicié du désert » au péril de sa vie le plus souvent, mais pour laisser un témoignage d'une force incroyable, aux limites de l'écoeurement, mais d'une impérieuse nécessité.


Loïc Di Stefano


Ed Vulliamy, Amexica, La guerre contre le crime organisé sur la frontière Etats-Unis/Mexique, Albin Michel, mars 2013, 460 pages, 22,50 euros.

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.