La scène est vide, entourée de draperies noires. Deux personnages viennent l’habiter de répliques qui semblent nouées d’artifices : surjouées, elles préparent une véritable chorégraphie par laquelle les comédiens définissent l’atmosphère, le mobilier, les postures de chacune des scènes. Ils sont habillés de façon homogène, couleur crème, de telle sorte que cela neutralise leur personnalité. Ils apparaissent successivement en figurant, meuble, principal protagoniste… L’ensemble constitue un ballet bien réglé, qui retient l’attention, en soulignant tous les ambages du texte. On se réjouit du décalage entre le texte et les procédés enjoués qui servent à le représenter. Les propos comme les corps virevoltent avec souplesse et acuité.

 

On assiste à un spectacle joyeusement construit, qui constitue manifestement une proposition intéressante. On en vient à se demander si elle n’est pas trop intelligente. Elle conduit en effet à neutraliser les marivaudages de la pièce, les coups de théâtre affectifs. Sans doute à tort, le metteur en scène s’interdit toute variation scénographique : la consistance du propos repose alors sur les acteurs, dont on avait initialement neutralisé la personnalité. Leur généreux investissement ne suffit pas à faire tenir cette interprétation du conte de Musset. Les révélations que prétend faire l’auteur auraient requis un changement de couleur, de jeu de scène, ou d’ambiance. Bref ; on eût apprécié de percevoir visuellement charnellement les revirements dits constitutifs de l’amour.

 

Christophe Giolito

 

On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset

mise en scène Christophe Thiry

 

Avec : Laurent Bariteau, Francis Bolela, Stanislas De La Tousche, Lucile Durant, Pascal Durozier, Sébastien Ehlinger, Marion Guy, Pierre Marzin, Koso Morina, Anna Sorin

 

Au théâtre Le Lucernaire
53, rue Notre-Dame des Champs
75006 Paris 01 45 44 57 34

Du mardi au samedi à 21h30
Le dimanche à 17h Durée : 1h30