Les contes festifs ou graves de Lionel Sourisseau

 

 


L'œuvre de Lionel Sourisseau est dans la descendance de celle de Basquiat.  Mais à l'inverse de l'Haïtien qui déclarait « J’essaie d’exprimer picturalement ma haine du monde moderne » le peintre français est moins dans le rejet du monde et de lui-même que dans une forme d’adhésion. L’artiste aime les masques, la fantaisie et se portraiturer de manière distanciée et en rien égotique. C'est pourquoi il se plaît à décliner des portraits multiethniques et multicolores en une suite de variations. Sa peinture est un labyrinthe peuplé de « ghosts dogs » aux couleurs violentes. Ils sont parfois drôles, parfois tragiques, faussement grandioses, faussement naïfs  et certainement pas académiques. En émergent des effondrements comme des remontées. Cela oblige la pensée et les ombres à céder. Pour autant peindre n’est pas saisir, encore moins posséder le monde ou le maîtriser.  Il s’agit de le montrer avec une conscience aiguë pour  le faire jaillir en un état naissant par une poésie des formes et des couleurs en grouillements intenses. Leur joie ou leur détresse vient tout ébranler. Fruit tangible de l’expérience de l’existence et du geste incarné la peinture ouvre donc le monde tel qu’il est. Loin de ses apparences il retrouve une tendresse même si des  épines se dressent. Elles sont faites plus pour griffer les sacristains de l’art, les tueurs d'homme que l’amateur d’éditions picturales. Contre  la ménopause des lys Sourisseau prouve que la peinture est initiation terrestre là où elle échappe aux rhéteurs qui maculent par dégradation le vrai sens du réel. La picturalité devient la lame de fond et du fond de l'âme capable de fendre l’être du sommet de ventre jusqu'à la base de la cervelle.  Elle est donc capable de transformer les appâts rances par son étincelle aussi mystique que corporelle.

Jean-Paul Gavard-Perret

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1 commentaire

Pour les gens normaux qui essaient de suivre les envolées lyriques et échevelées de JPGP qui inondent désormais le site, un recours fréquent au dictionnaire s'impose . Ici, j'ai cherché  le terme un peu barbare (pour ne pas dire moche) de "picturalité". je vous livre la def :  nf   caractère de ce qui est pictural, de ce qui peut être représenté par la peinture

Maintenant, pour savoir en quoi le fait d'être représentable en peinture serait "capable de fendre l’être du sommet de ventre jusqu'à la base de la cervelle. " et "donc capable de transformer les appâts rances par son étincelle aussi mystique que corporelle." , ben faut demander à l'auteur, j'avoue que je cale.