Jo Ciesla rêveur insomniaque et ailé

Dans l’aboi fauve d’un opéra  de formes évanescentes Jo Ciesla  poursuit son voyage. Il reste toujours capable d’inventer la naïveté qu’on accorde – à tord – aux temps passés. Son poignet caresse des surfaces pour étendre par touches magnétiques des sismographies déréglées. Le monde semble incertain, se perd en rêves de limbes au moment où  créer revient retrouver leur connivence, leur attirance, leur vérité. La nuit ils ressemblent à des ruelles où miaulent d’impossibles chats mais avec la peinture ils enseignent l’alcool des lendemains dont les voluptés n’ont rien de mécaniques. L’espace et le temps sortent de leur prison. Ciesla tel l’écorché-vif rêve  de la vitesse des flèches sans curare. Son imaginaire claque, drapeau au vent, dans le jeu spontané des lignes et les « flaques »  où le corps navigue sur son ombre Elle seule est à dompter. L’artiste en  fait  des graviers d’ivoire sur ses harpes de haute lisse médiévales. Et voici une nouvelle fois  une fresque des hommes aux signes trop souvent bifides. Ciesla y progresse, malgré tout et contre toute attente. Son œuvre tourne autour des spectres. La toile est un lieu géométrique entre le sexe et les morts, le réel et le rêve au sein  d’entrelacs dénoués, de vagues qui tiennent même quand le présent se fend.

 

Jean-Paul Gavard-Perret


Joseph Ciesla, « Turbulence dans l’eau et les rêves », Collection de la Praye, 01480 Fareins, du 18 octobre au 16 novembre 2014.

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1 commentaire

C'est anecdotique et probablement une coquille, mais il me souvient qu'à l'école on nous apprenait que le tort-tue d'être tord-u. Sinon, belle envolée lyrique et échevelée, assez en phase avec ce qui ressemble fort à des portraits de nuages avant l'orage, ou à un siphon d'évacuation dans un évier plein de mousse. Mais bon, ça peut être poétique, aussi, un évier plein de mousse.
 Je note pour en féliciter l'auteur-une fois n'est pas coutume-,  l'alliance osée du mot si désuet "aboi" avec "fauve", alliance déconcertante, mais finalement joliment évocatrice par son double sens inédit. Comme quoi, à force de coller des mots sans rapport, il peut arriver que l'on tombe juste.
C'était mon quart d'heure de bonté, vous avez bien fait d'en profiter.