Faites vos jeux, le premier tome des "Hunger games" de Suzanne Collins au cinéma

Les Hunger Games sont des jeux de massacre télévisés opposant vingt-quatre adolescents issus des douze ghettos principaux de l’Amérique du Nord de demain. Arène futuriste, mais ne manquant pas de rappeler les jeux antiques, ces Games font office de représailles gouvernementales après le soulèvement des plus pauvres. On sélectionne aléatoirement chaque année dans chaque province, appelée « district », deux adolescents pour offrir aux téléspectateurs pauvres ou riches un combat de coqs particulièrement sanglants, avec un seul vainqueur possible. Ce vainqueur, ou plutôt ce survivant sera couvert de richesses.

Katniss participe à la compétition après avoir pris volontairement la place de sa sœur. Flanquée de Peeta, autre adolescent de son district, elle va se lancer dans une quête effrénée pour sa survie. Bienvenue en enfer.

Adapté du roman homonyme de Suzanne Collins, Hunger Games propose, de prime abord, une version alléchante d’un futur orwellien. Bien que classique, l’opposition entre ghettos et cité luxueuse, avec à la clé une transposition moderne de la lutte des classes, se pose d’emblée comme la pierre angulaire d’un film politique « décomplexé ». Ajoutez le principe des jeux antiques transformés ici en « impôt » sacrificiel d’adolescents en perte de repères. On peut s’attendre légitimement à un spectacle oscillant entre outrance et réflexion. D’autant plus que le casting n’est point en reste, puisque le choix de la très belle Jennifer Lawrence pour le rôle de Katniss s’avère plus que judicieux : l’héroïne de Winter Bones signe une nouvelle fois une interprétation de haut vol. 

Les puristes vont rester sur leur faim...

Seulement, entre l’univers annoncé et le produit livré, entre les intentions d’origine et le message final, l’écart est tel qu’il faut bien parler d’échec. Malgré la contribution de Suzanne Collins au scénario, on se retrouve face à une production sans âme, un film pour adolescents parmi tant d’autres. La trame politique y est noyée sous un déluge de clichés sentimentaux souvent incongrus, et les accès de violence hésitent entre gore assumé et images édulcorées. La construction de l’espace est très mal gérée, car l’arène proposée, à la base gigantesque, se résume en définitive à trois ou quatre décors tout le long des jeux. Quant au triangle amoureux, Gary Ross le traite à travers une succession de plans grossiers bien plus ridicules qu’émouvants.

Mais surtout, comment ne pas penser à Battle Royale après avoir lu ou vu Hunger Games ? L’ombre du roman original de Batoru Rowaiaru (superbement adapté au cinéma par Kinji Fukusaku) est ici présehte dans chaque plan. Mais Gary Ross ne parvient jamais à surpasser son modèle. Autre influence sans doute, Le Prix du Danger d'Yves Boisset, adapté en 1983 du roman de science-fiction de Robert Sheckley, où un candidat doit survivre à ses poursuivants (avec l'aide de bons samaritains remplacés dans Hunger Games par les sponsors...). Si le contexte politique est différent, la critique de la télé-réalité poussée à l'extrême et le déroulement du « jeu » sont très proches, y compris la révolte contre le metteur en scène qui se retrouve dans les deux films.


...mais les adolescents vont adorer

Ce film est un produit pour adolescents, et il faut dire qu'il trouve bien sa cible. Avec quelques rebondisements inattendus, le spectateurs se laisse prendre et les deux heures de film passent sans moment creux. L'histoire, l'aventure, le sacrifice, le dépassement de soi, la force brute qui ne triomphe pas forcément, tout est en place pour inspirer les idéaux naissant. Bien sûr, le decorum très inspiré d'un IIIe Reich de pacotille et la décadence d'une société que montre la mode vestimentaire et l'ensemble des usages d'un peuple très stylisé (coupes de cheveux, parfum...), font un peu « kitsch » mais c'est quand même un spectacle réussi.


François Verstraete

HUNGER GAMES 
un film de Gary Ross
d'après le roman de Suzanne Collins
avec Jennifer Lawrence, Josh Hutcherson, Liam Hemsworth
2h22  
sortie en salles mars 2012 
sortie en DVD août 2012

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