Rencontre avec David Khara à propos d'Atomes crochus

A l'occasion de la parution de son dernier thriller, Atomes crochus, après une trop longue absence, nous avons rencontré David Khara,  membre émérite de la Ligue de l'Imaginaire, qui poursuit son exploration des multiples facettes du thriller en y ajoutant une dose de romantisme... à sa manière rassurons-nous, plus du côté de Sailor et Lula que de Walt Disney...

 

 

Pourquoi Atome crochus est-il sorti directement au format poche ?

 

Atome est à la fois un thriller basé sur des faits réels, et une comédie romantique, ce qui est nouveau pour moi. Histoire de simplifier le tout, je changeais également d’éditeur, et en prime après deux ans d’absence ! Une sortie en poche directe semblait cohérente au vu de ce contexte.

 

C’est deux ans votre tarif pour un roman ?

 

C’est de loin la question la plus injuste qui soit ! (Rires) Toute plaisanterie mise à part, avec six romans écrits et publiés en quatre ans, plus des nouvelles et d’autres travaux plumitifs autour du cinéma, je me considère assez prolifique. Mais effectivement, deux années se sont écoulées entre Une Nuit Eternelle et Atomes Crochus. Les raisons de ce délai sont doubles. Avec Atomes Crochus, je voulais explorer la comédie romantique, et si la comédie ne me pose pas de souci majeur (il y a toujours de l’humour dans mes romans), l’aspect romantique m’a confronté brutalement à moi-même. Je ne suis pas là pour me raconter, mais je suis un homme bien plus timide et pudique qu’on ne pourrait le penser et les personnages de mes romans précédents s’en ressentent. Werner et Barry dans Les Vestiges de l’Aube et plus encore Eytan dans les Projets, se livrent avec retenue et pudeur, voire quasiment pas dans le cas d’Eytan. Il ne s’agit pas d’insensibilité machiste, mais bien d’hyper sensibilité peu compatible avec la brutalité du monde actuel. Qu’ils soient vampires, flic ou agents secrets, mes personnages se protègent pour ne plus souffrir. C’est un réflexe terriblement humain. Et Enzo, au début d’Atomes, ne déroge pas à la règle. Mais la rencontre avec Janet va fissurer la carapace, et là, je me suis retrouvé face à un mur. Ou plutôt à ma propre carapace. A l’instar d’Enzo, j’ai dû la briser pour trouver les attitudes et les mots. Le blocage a atteint des proportions telles que j’ai bien cru ne jamais terminer le livre. Seul un évènement extérieur à l’écriture m’a permis de l’achever. Un très beau moment de vie que l’on retrouve dans l’épilogue et que je vous laisse deviner. Je l’ai toujours affirmé, le voyage que je propose au lecteur, je l’effectue avec lui. Et ce principe n’a jamais été aussi vrai que dans Atomes Crochus. Deux ans, au final, ce n’est pas cher payé…

 

On sent que vous êtes attachés à vos personnages, et sans forcément mettre de votre personnalité dedans. Comment avez-vous travaillé le duo improbable Enzo / Andrew ?

 

Je crois que dans les sept romans que j’ai écrits, il n’y a pas un seul de mes personnages auquel je ne me sois pas attaché.


Le fonctionnement entre Enzo et Janet m’a demandé énormément de travail. Il fallait déjà camper deux personnalités fortes, tout en créant l’illusion qu’Enzo était plus «épais » que Janet. Elle devait apparaître en retrait, cantonnée au rôle de la victime caricaturale des comédies romantiques, à charge pour moi d’imposer peu à peu son emprise sur l’histoire pour finir en personnage principal.

Toute la partie conflictuelle de leurs rapports a été relativement simple à traiter. Les choses sont devenues très complexes dès lors que la détestation immédiate fait place à une découverte de l’autre, à l’effondrement des préjugés puis à une attirance mutuelle. 
Il me fallait en permanence maintenir l’équation avancée-cohérence-pudeur ce qui m’a demandé énormément de réflexion et pas mal de réécriture. 
Quant à savoir s’il y a ou non une part de moi dans ce roman, allez savoir…

 

Le personnage de Janet est très décalé dans ce paysage de polar, comme s’il avait été pensé comme un handicap pour Enzo. Comment est né ce second duo de votre roman ?

 

Alors, félicitations, Janet a été pensé comme un handicap pour Enzo. Mais pas au sens "thriller" du terme car elle ne se sort plutôt pas mal des situations hasardeuses dans lesquelles elle se retrouve. Ce qui fait d’elle un handicap, ce sont les sentiments qu’elle éveille chez lui.
Enzo et Janet sont nés ex nihilo. Je n’avais aucun référent précis à l’esprit, mais je visualisais parfaitement ce grand gaillard faussement ténébreux et cette sémillante jeune femme insoumise. Enfin, quand je dis ex nihilo, je ne suis pas totalement honnête. J’avais un acteur en tête pour Enzo, Joe Manganiello. Si quelqu’un devait porter le rôle à l’écran, ce serait lui sans contestation possible.
Le rapport chien-chat entre les deux personnages n’a rien de très original, pour la simple raison que de très nombreux couples sont nés d’une première impression déplorable de l’un envers l’autre. L’intérêt se situait loin de ce ressort classique. Mes personnages incarnent toujours

 

Votre roman est très cinématographique, comme d'habitude. À quand un passage de l'autre côté ? ou une adaptation en BD ?

 

Je revendiquerai sans relâche et sa honte le fait d’écrire des films. Ma culture est plurielle, du cinéma à la littérature, de la BD au jeu vidéo. Ma narration, mes angles de vue, presque de caméra, sont influencés par ces références. Je n’exclue pas, un jour, de passer derrière une caméra. En fait, je pense que je ne vais pas tarder à harceler deux amis réalisateurs pour faire un stage sur leur prochain long métrage !

Pour ce qui est de la BD, les Vestiges ont déjà connu une adaptation par Serge le Tendre et Frédéric Peynet, éditée chez Dargaud. Et Dargaud s’est lancé dans l’aventure Bleiberg puisque trois tomes sortiront à partir de janvier 2017. Le Tendre, Peynet, Dargaud, j’avoue que l’amateur de BD que je suis est plus qu’heureux d’être entouré d’un tel trio !

 

Votre prochain roman sera nouveau un thriller ? ou enfin peut-être la suite de Thunder

 

Mon prochain roman sera un thriller dans le domaine médical et particulièrement celui des greffes d’organes. Il sera plus noir qu’Atomes, et sera teinté d’une dimension encore jamais traitée dans mes romans. Surprise… (rires).

Pour ce qui est de Thunder, je crains qu’en dépit de certains espoirs qui s’étaient fait jour, la série ne s’interrompe définitivement. 

 

Propos recueillis par Loïc Di Stefano


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