Dante & Ostovani : Primavera

Farhad Ostovani a subi le charme envoûtant de la Vita nova. Texte complexe, médiéval, épris d’absolu. Quête et célébration d’un amour pur. Aujourd’hui on sourirait devant tant de candeur. On penserait à une publicité. Mais à cette époque on croyait dur comme fer à la magie de l’amour. Il n’y avait pas la TV ni Internet pour démentir le concept. Et cela donna l’un des plus beaux poèmes de tout temps.

La sensibilité de Farhad Ostovani se refléta dans les vers. Inspira sa main. Et apparurent les planches de Primavera. Posées en complément des sonnets, elles jalonnent la musique des mots de Dante.

Fallait-il accompagner Dante ? Éternel duel entre le sacré et le profane. Dante suffit, seul, à traverser l’âme du lecteur. Farhad Ostovani de même, dans une galerie. Or, la bibliophilie se veut un mariage des mots et des formes. Histoire de transmettre autrement ce qui n’aurait pu l’être initialement. Ostovani n’aborde point le thème de l’amour. Il demeure les pieds sur terre. Dans ces parcelles d’herbes hautes. Le chant de Dante bercera les feuilles tel vent frais ravivant les braises d’hier…
Tout débute sur un fond pâle en demi-teinte d’où s’élancent des traces noires. La finesse du pinceau nous encourage à poursuivre. Signes primesautiers d’une possible présence. Des fleurs ? Sous l’herbe drue les corolles se donneront, offerte, soumise au cueilleur… Mais de cela nous n’en verrons rien. Le mouvement est inachevé. L’énergie suggérée. Le reste ne nous regarde pas.

Farhad Ostovani ne déclame point ici une manière de. Il ne spécule en rien, contrairement à la mode actuelle. Il propose une possible attitude. Humble et mélancolique, il reste proche de la terre. L’aide à se redresser malgré les turpitudes de l’Homme. Accepte son salut malgré la douleur. Car la Terre souffre, plie, mais ne rompt point. Pour s’en convaincre, au terme de son parcours, l’artiste usera de la photographie. Medium ultra-précis pour souligner l’importance du détail. Patient, attentionné, Farhad Ostovani se détourne de tout orgueil pour reconstruire l’origine. Nous invitant à tendre vers une intelligence nouvelle (Sonnet XXV).

Annabelle Hautecontre

Farhad Ostovani, Primavera, préface de Jeanne Dorn, illustrations couleur, 210 x 250, coll. Monographies, L’Atelier contemporain, novembre 2021, 130 p.-, 25 €

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