La carrière de Joël Houssin dans le milieu de la science-fiction française fut celle d’un météore. Il commença par publier un roman d’anticipation urbaine assez violent, Locomotive rictus (réécrit et republié par les éditions Ring en 2012) puis devint un pilier des éditions du Fleuve noir. Il y publia des romans de science-fiction très intenses comme Le pronostiqueur, Blue ou Le champion des mondes et surtout la saga du Doberman dans la collection spécial police. Le personnage du Doberman imposa Joël Houssin au grand public et lui permit de signer des romans plus ambitieux comme Les vautours, Argentine et donc Le temps du Twist, qui obtint le grand prix de l’imaginaire en 1992. Plus de vingt ans, le voici réédité, en même temps que les albums du groupe Led Zeppelin, un des sujets de ce roman.

Du futur, faisons table rase

Le monde d’Antonin Hofa est un cauchemar. L’air est empoisonné et seul l’alcool permet de tenir face aux différentes maladies qui rongent l’humanité. Pour son seizième anniversaire, le jeune homme reçoit comme cadeau une Buick Electra capable de voyager dans le temps. Or, Antonin a toujours rêvé d’une chose (mis à part le sexe) : voir Led Zeppelin en concert. En voiture Simone et en route pour Londres pour voir le dirigeable prendre son envol ! Le problème est qu’un robot est en train de changer l’histoire : Jimmy Page est loin d’être un guitariste surdoué et Led Zeppelin n’existe pas. Antonin doit rétablir l’histoire…

Dazed and confused

Zombies, loup-garou, voyage dans le temps : Le temps du twist tire dans plein de directions et ça fonctionne. Le roman est assez enivrant, pour deux raisons. D’abord par son personnage, Antonin, adolescent alcoolique en proie aux tourments de son âge (quelque part, le temps du twist est le rêve et le cauchemar de l’adolescence). Enfin, c’est un fantastique hommage à la magie de Led Zeppelin, dissous en 1980 et probablement le plus grand groupe de hard rock qui n’ait jamais existé. Alors, rien que pour ça, lisez-le.

« Ce soir-là, lorsque Jimmy Page brandit son archet au-dessus d’une Gibson rutilante et qu’un gosse força le barrage de gorilles pour venir s’agenouiller à ses pieds, Antonin se pétrifia. Dazed and confused. Le temps s’arrêta. Bonham, Jonesy, Plant et les videurs regardèrent ce gamin en prière sans intervenir. La foule cessa de hurler. Jimmy Page avait les yeux fermés. L’archet glissa entre les micros de la Gibson. Et Lorsque Page le dressa vers le ciel, Antonin crut voir jaillir de l’instrument une fine arabesque d’étincelles scintillantes… »

Sylvain Bonnet

Joël Houssin, Le temps du twist, Gallimard folio SF, mai 2014, 304 pages, 7,50 €