Jonathan Ames est connu outre
atlantique en tant que créateur de la série HBO, Born to Death. Cette série s’est inspirée de la première nouvelle
du recueil Une double vie, c’est deux
fois mieux publiée aux éditions Joëlle Losfeld en 2012. On lui doit
également je vais comme la nuit qui
racontait les aventures d’un portier de restaurant chic de Manhattan, l’Homme de compagnie qui relatait
l’amitié salvatrice entre deux doux dingues ou encore Réveillez-vous, Monsieur relatant les tribulations d’un écrivain
perturbé et de son valet. Le point commun de ces différents romans : leur
excentricité et leur légèreté. On retrouve cette excentricité dans son dernier
roman Tu n’as jamais été vraiment là,
un roman décalé et surprenant qui tient presque plus de la nouvelle.
Joe est un ancien marine et un
ex-agent du FBI qui s’était spécialisé dans les crimes touchant les mineurs.
Jusqu’à l’affaire de trop, celle qui lui fait pété un câble, sauté une durite
et qui le renvoie directement chez sa mère, la seule raison pour laquelle il
est d’ailleurs encore sur terre alors qu’il n’aspire plus qu’à disparaître
totalement, définitivement et proprement. En attendant, il accepte des missions
sous couvert d’anonymat. Lorsqu’un homme politique de premier plan le contacte
pour extraire sa fille adolescente d’un réseau de prostitution, il est loin de
s’imaginer ce qu’il va découvrir. Alors qu’il avait toujours réussi à dissocier
sa vie personnelle de sa vie professionnelle, les deux vont se retrouver
intimement liés et lorsque l’on s’attaque aux gens qu’il aime, Joe peut voir
rouge.
L’intrigue de départ est
simple : un homme politique fait appel à un mercenaire pour extraire sa
fille mineure d’une maison close. Une affaire simple et rapide pour Joe qui
tient plus de l’anti héro que du héro. L’affaire se complique forcement et de
chasseur, Joe devient la proie. Cela ressemble à un scénario de film d’action
du moins au début. En une centaine de pages seulement, Jonathan Ames réussit à
nous surprendre et nous fait suivre le réveil émotionnel de notre enquêteur.
Ainsi l’autre grand intérêt de ce roman, comme dans les autres romans de
Jonathan Ames, repose sur la personnalité de Joe : froid et méthodique, il
agit comme une machine. Personne ne sait qui il est vraiment, personne ne sait
où il habite, il se déplace rapidement et sans bruit et n’est jamais vraiment
là. Lui-même se définit comme une coquille vide. Nous avons donc affaire à une
espèce de Jason Statham dépressif et suicidaire dont seul lien social est sa
vieille mère. Au final, pas vraiment de dénouement ou disons que celui-ci est
relaté en deux pages et nous laisse un arrière goût d’inachevé car l’on aurait
bien aimé prolonger notre lecture et notre immersion dans le monde de Jonathan
Ames.
Julie Lecanu
Jonathan Ames, Tu n’as jamais été vraiment là, traduit
de l’anglais par Jean-Paul Gratias, éditions Joëlle Losfeld, août 2013, 98
pages, 12,90 euros.
0 commentaire