La Gaieté de Justine Lévy : Aime-t-on trop ses enfants ?

La romancière revisite son passé à l’aune de sa maternité.

 

On l’avait laissé à son deuil, à ses angoisses, à sa mère trop instable, à son père trop célèbre. Là, l’héroïne de Justine Lévy, son alter ego tant l’auteur ne se préoccupe pas de voiler la réalité, Louise, donc, attend un enfant. Quoi de plus banal, mais un évènement presque inconcevable pour celle qui est restée elle-même si petite. Et sa mère n’a-t-elle pas elle-même cherché le bonheur toute sa vie sans jamais le trouver ? Alors Louise prend une grande résolution et décide pour ses enfants d’arrêter d’être triste, et ceci pour toujours. Mais quand on est sujette aux crises d’angoisse, habituée des psys, croqueuse d’anti-dépresseurs à foison, ce n’est pas simple. Heureusement, elle peut s’appuyer sur Pablo, son mari, Angèle sa fille et Paul son fils.

 

L’héroïne avance ainsi dans la vie, reculant souvent, essayant toujours, l’élégance à fleur de peau. Elle reste fragile, ne sortant rarement de son quartier, passant son temps à briquer son intérieur. Mais le ménage s’opère aussi dans la tête : Louise fait la paix avec sa mère morte, découvre un évènement proprement inouï de sa petite enfance en Malaisie, dont on ne peut vous dévoiler la teneur, revisite avec tendresse son père aimant et inquiet, et s’offre même le luxe de boxer une allumeuse en soirée !

 

Les meilleures pages, et il y en a beaucoup dans cette autofiction très réussie, à l’écriture sèche et rapide, concernent les belles-mères, les femmes successives du père, méchantes et vicieuses pendant toute l’enfance de l’auteur. En leur tordant le cou (symboliquement, je vous rassure !) et en ouvrant grand la cage aux souvenirs sans fards aucuns, l’écrivain s’émancipe et s’assume. C’est ce que l’on doit appeler devenir adulte.


Ariane Bois

 

Justine Lévy, La Gaieté, Stock, janvier 2015, 213 pages, 18 € 

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