Marie Darrieussecq rêveuse insomniaque

Marie Darrieussecq a lutté plus de vingt ans de toutes ses forces contre l'insomnie. En vain. les somnifères, les rituels d'endormissement, l'alcool, la drogue sont demeurés inopérants. Il est vrai que question alcool l'auteure a préféré la qualité à la quantité. Devenue "esthète" elle ne buvait que"du bon vin, du bio, du naturel, sans sulfates. Duras ne connut pas ce snobisme...

Mais l'auteure de Pas dormir a pris l'insomnie au sérieux. Elle a compris qu'il s'agissait d'une souffrance, d'une maladie dangereuse et qui pouvait suivant les lieux où elle est subie renvoyer à d'autres monstres comme ce fut le cas lors de son séjour au Rwanda. Et ce même si la société capitaliste semble apprécier plus les insomniaques que les gros dormeurs.

Darrieussecq a donc tenté d'étudier l'origine de son insomnie et d'obtenir un diagnostic. Selon sa mère, si sa fille avait choisi un "vrai" métier, elle dormirait mieux. Mais ce conseil comme ceux des somnologues sont restés inopérants. En guise de consolation, l'écrivaine rappelle que Kafka était dans le genre un merveilleux compagnon d'infortune qui entrait profondément dans l'insomnie qu'il avait des visiteurs. 

Mais il aurait aujourd'hui plus de raison de le devenir : Je pense vraiment que notre insomnie s'aggrave à mesure que nous détruisons notre planète, qui est aussi notre vaste chambre. Ce sont les conséquences du capitalisme sur notre sol et nos océans, écrit-elle. Et d'ajouter : Je crois sincèrement que notre insomnie s'accroît à mesure qu'on déboise. Son explication en vaut bien d'autres. Même si l'énigme garde son mystère.

Jean-Paul Gavard-Perret

Marie Darrieussecq, Pas dormir, P.O.L éditeur, septembre 2021, 320 p.-, 19,90 €

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