Nathalie Azoulai au musée

Au moment où, et dans le même temps, avec Clic-clac qui remonte à l'envers une histoire d'amour non sans un certain romantisme, Nathalie Azoulai propose un livre plus court qui fait passer vers un autre registre.

Ici la littérature devient plus sèche. Elle est marquée d'abord par l'agacement de la narratrice avant qu'elle ne plonge dans une sorte de remord et de culpabilité de classe sociale qui hantent tous les livres de l'auteure.

Ecrit pour le théâtre (il sera joué en 2020), ce monologue ou soliloque est celui d'une provinciale qui visite chaque après-midi un petit musée de sa ville dont elle est pratiquement la seule "cliente".
Elle se retrouve chaque fois en présence du gardien de lieu. Il va devenir sinon une obsession, du moins une "fixette". Elle s'adresse à lui en sourdine et dans une sorte de posture d'une bourreau implicite.

La narratrice ne supporte pas une telle passivité avant de retourner sa véhémence envers elle-même eu égard à ce qu'elle représente par sa propre réussite.
Le gardien est donc l'objet ou le sujet d'un déterminisme qui est beaucoup plus large que sa simple présence. Cela interpelle sur les modèles qui sont donnés à un individu de connaître.

Par ailleurs Nathalie Azoulai par cette interaction bancale (l'une parle, l'autre pas) met en scène une héroïne-reflet. Elle montre combien chacun est conditionnée socialement plus, ici, que par son genre.
Elle suggère enfin combien chacun souhaite sans défaire - ou pas. D'où la profondeur d'un impératif intérieur que dictent des situations donc des possibilités bien différentes  des les découdre, déchirer ou subir.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Nathalie Azoulai, En découdre, P.O.L éditeur, octobre 2019, 96 p., 13 €

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