Tahmima Anam, "Un bon musulman" : une lecture qui laisse un arrière goût, une tristesse

Le  Bengale oriental de l’Empire des Indes devint le Bangladesh en mars 1971. Il fut d’abord partie intégrante de la République islamique du Pakistan. Avant que l’éloignement géographique et la poigne de fer ne poussent les indépendantistes à œuvrer. Au terme d’une guerre civile sanglante, le quatrième pays musulman du monde vit le jour. Un pays qui exporte peu sa culture. Surtout littéraire. Car mis à part Taslima Nasreen et Monica Ali, bien peu de traduction. Il est donc intéressant d’ouvrir le dernier roman de Tahmima Anam. Cette jeune femme polyglotte possède un doctorat en anthropologie. Elle a grandi à Paris, New York et Bangkok. Vit actuellement à Londres. Une fille de monde, qui est née à Dacca, en 1975. Nouvelle génération. Nouvelle approche littéraire. Plume alerte, sujets brûlants. On devine la foule des témoignages recueillis. Le matériau originel qu’il a fallu dénicher derrière le tabou. La honte. Les douleurs.


Tout commence à la fin de la guerre de libération. 1971. Et comme toujours, le plus dur n’est pas d’abattre les murailles. Mais de construire une paix juste et durable. Nul besoin d’être fin sociologue pour savoir que dans ce pays la place des femmes n’est pas. Non pas une égalité à rechercher. Mais tout simplement une identité à affirmer. La femme est encore moins bien perçue qu’un animal. Alors quand Maya ouvre un dispensaire et s’implique dans l’émancipation des femmes de son pays, il y a un hic. Avec son frère Sohail qui ne vit, ne pense que par et pour la religion. Le dogme. Le Coran aurait réponse à tout. Si tel est le cas, il y a longtemps que cela se saurait, non ?


Voilà donc un roman nécessaire. Indispensable. Un roman que l’on aurait tant aimé ne pas lire. Tant aimé qu’il n’ait pas existé. Car cela aurait démontré que la sagesse des hommes s’était répandue. Alors que l’aveuglement des mâles prédomine encore sur bien des terres du monde, au 21ème siècle !
Pourquoi le monde devrait-il se retrouver dans un duel bipolaire entre la modernité et l’obscurantisme ? Les contradictions de cette famille écartelée, si bien décrites par Tahmima Anam, réussiront-elles à ouvrir les yeux des plus endurcis ? Certainement pas. Chronique d’une guerre sans fin, ce roman stigmatise les vices et les dérives de l’intolérance en nous offrant une plongée dans le quotidien d’un pays méconnu. Un voyage sans effort qui laisse un arrière goût, une tristesse. Une résignation face à cette folie des hommes qui semble bien être impossible à stopper...


Annabelle Hautecontre


Tahmima Anam, Un bon musulman, traduit de l’anglais (Bangladesh) par Sophie Bastide-Foltz,  Actes Sud,  "Lettres indiennes", 145 x 240, janvier 2012, 288 p. - 22,50 €    

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.