Jean-Claude Hauc : rupture

Sous un titre pétard, court un livre espiègle et grave le tout au nom des femmes. Elles sont les multiples tremplins qui s’éloignent lorsque l'heure de la retraite a sonné. C'est du moins ce que s'efforce de croire le narrateur.

Mais celles qui furent pivots existentiels et leviers romanesques risquent de voire leur radicalité garder force de loi : ce sont des sets de table, des patrons faits pour réenchanter l'existence d'un sociopathe un rien belliqueux et mélomane qui espère néanmoins trouver dans ses aveux une sorte de "dont acte".

Histoire de faire avaler des couleuvres qui s’oublieraient aussitôt là où se termine (ou échoue) son périple, l'imaginaire reste paradoxal et ne s'oppose pas à une forme de rationalité. Il ne témoigne pas de son appauvrissement mais de sa revitalisation hors des sentiers battus. Ils sont remplacés par ceux d'un pédagogue aux mœurs presque indéfendables.

Tout se termine selon une rupture au sein même d'une continuité que seul l'âge viendrait interrompre. Mais il y a bien longtemps que le ver est dans le fruit et le philosophe dans des boudoirs. L'effet de vertige est stimulant et crée une suite de décrochages capables de mettre à nu des schèmes premiers et des narrations dites "pré-natales". 

Exit l'habituelle fiction "à la française" ou du réalisme à la Courbet. Le néos véridique est renvoyé à une préhistoire même si le doute est permis. L'espace euclidien comme le temps chronologique font partie aussi du grand déménagement  entamé par Hauc éloigné de toute économie restreinte. 

Existent plusieurs théâtres de la discontinuité et des écarts en divers processus afin de dénoncer les ordonnances de représentation et d'y substituer des propositions représentatives. Et ce  jusqu'à éliminer – à la fin – la pellicule qui recouvrait jusque là bien des zones d’ombres d'un malandrin au mieux de sa forme et dont la canne à pêche offerte lors de sa retraite risque de rester si l'on peut dire lettre morte. 
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Jean-Claude Hauc, Un arrière-goût de rat, coll. Roman, Tinbad, octobre 2021, 176 p., 18 €

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